“Des moments pour tisser du lien social”
Anselme Jalon, CEO de Numa.
“Nous faisons tout notre possible pour éviter les réunions ! Ce n’est pas notre mode de travail et de communication par défaut, au contraire. Nous avons une forte culture de l’écrit et de l’asynchrone. Avant chaque réunion, en interne comme en externe, nous partageons un Google Doc à lire et à commenter par chacun avant le Jour J. Le manager arbitre pour que ne soient discutés lors de la réunion que les points n’ayant pas été déjà tranchés ou nécessitant d’en débattre de vive voix. S’il n’y en a pas, on annule tout simplement le meeting. Quand il s’agit d’un point avec un ou plusieurs membres de mon équipe, ce travail préparatoire me permet aussi de consacrer du temps à l’essentiel, à savoir comment vont mes collaborateurs au lieu de passer le sujet à la va-vite. Les réunions sont ainsi des moments pour tisser du lien social.
Travaillant en asynchrone, on s’envoie beaucoup de notes vocales ou même des vidéos pour valider des présentations par exemple. Autre élément clé : le partage des agendas professionnels pour éviter de caler des rendez-vous sur des créneaux qui ne conviendraient pas à tout le monde. Personnellement, mes mercredis après-midi sont réservés au deep work et je n’accepte aucune réunion. C’est inscrit dans mon planning, et tout le monde le respecte. C’est vrai pour moi comme pour n’importe quel salarié de Numa. Mon entreprise précédente adorait les réunions, je constate aujourd’hui que j’ai beaucoup plus de temps pour réfléchir à des sujets de fond.”
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Comment se réapproprier son temps au travail ?
“L’exemplarité doit venir des managers”
Laure Aimé, Conseillère RH et QVCT au sein de Juridica (filiale d’AXA).
“Les réunions sont souvent perçues comme étant chronophages, trop nombreuses et pas toujours efficaces. Avec la démocratisation du travail en hybride et la hausse des rendez-vous en visio, il est essentiel aujourd’hui de davantage cadrer les réunions : les organiser à bon escient, réduire leur durée à 25 ou à 45 minutes pour permettre des pauses entre les meetings, ne pas en planifier pendant la pause-déjeuner, tôt le matin ou tard le soir pour veiller au bon équilibre vie pro – vie perso des collaborateurs… L’exemplarité doit venir des managers, et ces derniers doivent permettre aux salariés de pouvoir refuser une réunion sans crainte. Ces bonnes pratiques ont notamment été intégrées dans nos chartes d’équipe liées au télétravail. Tous nos collaborateurs ont participé à la rédaction de ces chartes et ont pu apporter leurs idées sur le sujet.”
“Créer les conditions de la confiance”
Louis Vareille, réuniologue, auteur de La réunionite ça suffit ! (Eyrolles).
“Il est primordial que la réunion soit inclusive, c’est-à-dire que tous les participants se sentent suffisamment à l’aise pour participer. Les chefs comme les non-chefs. Les anciens comme les nouveaux. Les extravertis comme les introvertis. Pour rappel, un introverti n’est pas timide, c’est juste quelqu’un qui a besoin de prendre du temps pour réfléchir avant de parler. Il ne faut donc pas le cueillir à froid, mais lui envoyer en amont de quoi se préparer pour ne pas l’exclure des discussions. Il est aussi important que tous les participants quittent la réunion avec le sentiment d’avoir été entendus et d’avoir été utiles : des acteurs, pas des figurants ! La clé est de réussir à instaurer un climat de sécurité psychologique où chacun sait qu’il peut intervenir sereinement et même se tromper sans prendre de risque.
Au-delà des prérequis basiques à toute réunion (avoir un objectif clair, bien choisir les participants, etc.), cela demande de consacrer un temps au lancement pour créer les conditions de la confiance, en rappelant l’horaire de fin, en répartissant les rôles, en fixant des règles, en alignant les participants sur l’objectif – qui peut être générer des idées, décider d’un plan d’actions ou bien augmenter l’engagement de l’équipe – et en finissant par le plan de la réunion. Une fois dans les discussions, l’animation doit être attentive à tous. Idéalement, le manager doit essayer de parler le moins possible et varier les modalités de participation : oral/écrit (via le tchat ou des sondages par exemples en visio), répartition en petits groupes, etc.
En réunion asymétrique, il peut être utile de désigner un «régulateur empathique», chargé de prendre en compte les besoins des personnes à distance. Soyez enfin vigilant aux signaux non verbaux des participants : multitasking, moues, regards … afin de pouvoir ajuster l’animation. À éviter à tout prix : un déséquilibre des prises de parole à cause de personnes dominantes, ou encore l’absence de questions ou d’objections. Sans interaction, fallait-il vraiment une réunion ?”
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