Carrière

Julia de Funès : « L’absence de sens au travail est une source de souffrance »

Cet article est issu du dossier "Philosophie : changez de regard sur le monde du travail !"

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Pourquoi s'interroger sur le sens de son travail n'est pas anecdotique, mais, au contraire, fondamental ? Qu'est-ce que changent l'intelligence artificielle et la robotisation dans cette réflexion ? L'éclairage de la philosophe Julia de Funès, auteure des livres "Le siècle des égarés" et "Développement (Im)personnel" (Les éditions de l’Observatoire).

S’interroger sur le sens de son travail concerne toutes les strates de l’entreprise et tous les individus. Souvent on entend dire « Oui mais celui qui va à l’usine ne se pose pas la question du sens de son travail », c’est totalement faux et c’est déshumaniser les travailleurs les moins favorisés. Le sens est plus évident dans cette situation-là (il s’agit de gagner de l’argent et de manger) mais il n’en est pas moins présent.

Aujourd’hui, on traverse une crise de sens pour plusieurs raisons. Non seulement l’individualisation du sens lié à l’effondrement progressif des autorités. Mais aussi une technicisation accrue des tâches qui définalise inévitablement les métiers. La technique c’est le moyen, le sens c’est la finalité. Plus les métiers sont techniques, plus ils deviennent pointus sur les moyens, plus vite ils perdent de vue leur finalité. Ça ne veut pas dire que la technique est insensée, loin de là, mais elle augmente l’exigence de sens. Plus on technicise, plus on mise sur les moyens, plus la finalité s’obscurcit. Dans certains métiers devenus tellement techniques, les gens ne voient plus le résultat tangible de ce qu’ils entreprennent. Or, c’est un besoin absolument essentiel à tous les âges de la vie de pouvoir répondre à la question du sens de ce qu’on fait.

L’absence de sens est non seulement une source de souffrance mais une souffrance liée au sentiment de déshumanisation. Quand on applique pour appliquer sans se poser de question, on est réduit à n’être qu’un rouage, une machine, et une machine bas de gamme à l’heure de l’intelligence artificielle et de la robotisation. Si on ne veut pas faire des nouvelles technologies des puissances autonomes qui nous remplacent, mais des moyens à notre service, il faut qu’on mise sur ce qu’on a de spécifiquement humain et qu’on le cultive. La réflexivité sur le sens de ses propres actions distingue encore (pour combien de temps je ne sais pas) l’homme de la machine.

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