Mi-janvier 2024, le PDG de la RATP, Jean Castex, avait évoqué des évolutions du marché du travail se traduisant notamment par des « difficultés de recrutement », un « absentéisme inédit » et un « turn-over inégalé ». Près d’un mois après cette prise de parole, le groupe RATP a annoncé avoir signé, avec trois organisations syndicales représentatives (FO, CFE-CGC et UNSA), un accord pour améliorer la qualité de vie et les conditions de travail des salariés (QVCT). Nathalie Ponzévéra, Directrice des Services de Santé au Travail du groupe RATP revient avec nous sur cette démarche et les résultats espérés.
Courrier Cadres – Etait-il urgent de se préoccuper de la QVCT au sein de la RATP ?
Nathalie Ponzévéra – Ce n’était pas urgent, mais c’était important de prendre le sujet au sérieux. Lorsque Jean Castex s’est déplacé pour rencontrer le personnel sur le terrain, il a pris conscience de l’émergence de nouveaux besoins, comme celui d’avoir un meilleur équilibre entre vie personnelle et professionnelle. C’est l’un des leviers majeurs de cet accord. Les deux autres piliers clés sont l’émancipation des collaborateurs et la création d’un environnement de travail sécurisant et agréable pour tous. En réalité, nous avions déjà de nombreuses mesures en faveur de la QVCT, mais elles n’étaient pas suffisamment mises en valeur, ni déployées sur le terrain. Les managers, premier relais avec les équipes, n’en avaient pas assez connaissance. L’enjeu est de renforcer la visibilité des mesures existantes et d’en développer de nouvelles.
CC – Concrètement, que prévoient les trois piliers de cet accord pour les salariés ?
NP – Les mesures sont nombreuses. Parmi les plus importantes, nous avons commencé à tester la semaine de 4 jours avec 170 salariés volontaires. Ce choix n’est pas une réponse à la déclaration de Gabriel Attal sur le sujet, car nous y travaillons depuis juin 2023. Fin janvier dernier, nous avions déjà lancé cette expérimentation auprès de cet échantillon d’agents. Nous tirerons un premier bilan au cours de l’été 2024, avant de déployer cette mesure à plus grande échelle si elle fonctionne. Nous allons proposer par ailleurs, plus de places en crèches pour certains salariés parents. Leurs horaires décalés posent fréquemment problème pour la garde de leurs enfants. Nous comptons étendre notre offre de logements pour les collaborateurs vivant loin de leur lieu de travail pour des raisons financières. Nous en avions mis 560 à disposition en 2023, nous voulons en avoir 860 en 2024 et 1200 en 2025 afin de réduire leur éloignement géographique. Nous allons rénover de nombreux locaux dans les stations pour améliorer le confort des vestiaires, des sanitaires ou encore des salles de pause des agents. Enfin, nous souhaitons baisser le nombre de réunions, très chronophages dans l’emploi du temps des cadres du groupe, afin qu’ils disposent d’une demi-journée par semaine pour se concentrer sur des sujets de fond.
CC – Le manager va jouer un rôle clef dans cet accord, n’est-ce pas ?
NP – Tout à fait. Nous voulons remettre le manager au cœur des équipes afin que celles-ci soient mieux accompagnées dans leur quotidien professionnel. Cela passera notamment par l’instauration d’une relation de confiance et d’un dialogue de qualité (feedbacks, entretiens individuels) afin de faire remonter régulièrement les problèmes rencontrés sur le terrain et de mettre en place un plan d’action d’améliorations. Les managers, eux aussi, seront accompagnés sur des questions importantes comme la sécurité au travail. Nous espérons que cela sera source d’engagement et de motivation au sein des équipes. En cascade, cela devrait réduire le taux d’absentéisme. Nous voulons redonner du sens au travail de nos managers et collaborateurs afin de les fidéliser. Mais aussi, servir l’attractivité du groupe…
Des besoins de recrutement renforcés pour les JO
Ces mesures tombent à pic, à quelques mois des Jeux olympiques et paralympiques de Paris (JOP 2024). Le renfort d’offres de transports (+15 % par rapport à un mois d’août habituel) prévu pendant cette période de forte affluence va inévitablement entraîner la nécessité de recruter. La RATP prévoit ainsi d’intégrer 5 300 nouveaux collaborateurs en Île-de-France en 2024, dont près de 900 spécialement pour les JOP 2024 afin « d’assurer un service exceptionnel » pendant cet évènement mondial, précise la RATP.