Employabilité des séniors : comment les (ré)intégrer sur le marché du travail ?
Carrière

Employabilité des séniors : comment les (ré)intégrer sur le marché du travail ?

Depuis l'adoption de la réforme des retraites en mars dernier, les débats se poursuivent autour du maintien des séniors en emploi. Mais que faire lorsque plus de 25 % d'entre eux sont déjà inactifs ou au chômage ? Aude Boudaud, directrice du cabinet Robert Walters, nous donne quelques pistes d'amélioration.

Un défi particulièrement ambitieux. Dans la foulée de la réforme des retraites, adoptée par le Parlement il y a près d’un an, la question du maintien des séniors en emploi s’est glissée au cœur des débats. Si l’exécutif entend redresser le taux d’activité des 60-64 ans, de 33 % actuellement à 65 % à l’horizon 2030, ce n’est pas gagné du côté des entreprises. Car, au-delà de l’index sénior – incitation à la transparence au sein des entreprises sur la place des salariés en fin de carrière -, encore faut-il qu’ils soient toujours en activité ! Plus d’un sénior sur quatre âgé de 60 ans et plus est inactif ou au chômage, d’après une étude de l’Union Nationale Interprofessionnelle pour l’Emploi dans l’Industrie et le Commerce (Unédic). Se pose alors la question de comment les (ré)intégrer sur le marché du travail avant un futur départ à la retraite ?

Transparence de la rémunération

La rémunération est le premier facteur bloquant lors de l’embauche de profils séniors, selon Aude Boudaud, directrice du cabinet Robert Walters. « Les entreprises ont tendance à penser que ces profils expérimentés vont coûter trop chers, tandis que de leur côté, les candidats séniors se demandent s’ils sont légitimes pour prétendre au poste proposé. » Conséquence ? 32 % des entreprises regrettent de ne pas recevoir suffisamment de candidatures de ces derniers, d’après l’étude du cabinet Robert Walters. Pour optimiser leur retour sur le marché du travail, elle invite les entreprises à « être plus transparentes dans leurs offres d’emploi » et les candidats à « oser envoyer leur candidature. Dès 45 ans, ils commencent à redouter de voir leur candidature refoulée par un recruteur en raison de leur âge », souligne-t-elle.

Si les séniors ont de grandes chances d’être recrutés pour leurs compétences humaines (aisance relationnelle, résistance au stress, loyauté…), presque huit entreprises sur dix (79 %) craignent qu’ils n’aient pas les compétences techniques requises liées aux nouvelles technologies. A tort, selon Aude Boudaud. « Beaucoup de profils séniors s’intéressent aux évolutions technologiques, et beaucoup d’autres sont motivés pour apprendre de nouvelles choses grâce aux formations proposées par les entreprises ».

Déconstruire les clichés

Enfin, les entreprises peuvent se limiter en raison de fausses croyances : réticence supposée des séniors au changement, manque de créativité, ou problèmes de santé potentiels nécessitant un aménagement du temps de travail. « Nous devons collectivement déconstruire ces clichés. La majorité des séniors sont très dynamiques et ont une expérience directement applicable sur le terrain, qu’ils peuvent transmettre aux plus jeunes ». Pour l’heure, seulement 23 % de professionnels interrogés estiment que les entreprises sont engagées sur ce sujet. 27 % déclarent même ne pas savoir ce qu’elles mettent en place en ce sens. Signe d’un réel manque de communication de la part des organisations. « L’évolution reste lente. La formation des recruteurs sur ces sujets de discriminations et de biais cognitifs, ou encore l’instauration de quotas pourraient être de véritables accélérateurs à leur (ré)intégration », termine la dirigeante.

A noter que le report de deux ans de l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans pourrait se traduire par une hausse du nombre d’allocataires au chômage des personnes de plus de 60 ans. Le dernier report de l’âge à la retraite de 60 à 62 ans avait, en effet, entraîné 100 000 chômeurs supplémentaires de cet âge-là entre 2010 et 2022, selon l’étude de l’Union Nationale Interprofessionnelle pour l’Emploi dans l’Industrie et le Commerce (Unédic). En 2022, les plus de 55 ans représentaient 400 000 indemnisés par l’assurance chômage (soit 18 % tous allocataires confondus). Au total, les dépenses d’indemnisation pour ces derniers avaient augmenté de 38 % depuis 2010, et sont passées de 4,8 milliards d’euros en 2010 à 6,7 milliards d’euros en 2022. D’après une enquête de la DARES, publiée en 2019, décaler l’âge de départ à la retraite à 64 ans pourrait entraîner 1,3 milliard de dépenses supplémentaires pour l’assurance chômage.

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