C’est une avancée sans précédent. L’évocation de son orientation sexuelle ou de son identité de genre ne serait (presque) plus un tabou au travail en France. C’est en tout cas ce que montre le 4ème Baromètre* sur cette question, publié ce jeudi 25 avril 2024 : il révèle en effet que 60 % des personnes LGBT+ (homosexuelles, bi/pansexuelles, asexuelles et transgenres) en parlent auprès de leurs collègues, contre 50 % en 2018. « C’est une très bonne nouvelle. Cela signifie qu’elles sont davantage en confiance pour en parler librement et prendre part à la vie collective de l’entreprise », se satisfait Catherine Tripon, porte-parole de l’Autre Cercle. A noter que ce chiffre est légèrement en baisse (49 %) quand il s’agit d’en parler à son supérieur hiérarchique direct.
Selon la porte-parole de l’association, cette libération de la parole au travail est rendue possible grâce à une évolution sociétale autour de ces enjeux, ainsi qu’aux politiques volontaristes menées en entreprise en matière d’inclusion depuis des années. « Les personnes LGBT+ se rendent plus visibles auprès de leur employeur en activant, par exemple, leurs droits parentaux après avoir un enfant par le biais d’une GPA (gestation pour autrui, ndlr), ou bien en dénonçant des dysfonctionnements en interne », explique-t-elle.
Cette évolution positive des états d’esprit a entraîné un recul des actes de violence (verbale, physique, psychique) en entreprise à l’égard de cette catégorie d’actifs. Effectivement, ils sont passés de 14 % en 2021 à 10 % en 2024. Les discriminations LGBTphobes – notamment dans le recrutement ou dans la rémunération – sont, elles aussi, en net recul. Une tendance portée par l’accord professionnel de 2007 relatif à la non-discrimination, à l’égalité de traitement, et à la diversité des salariés permanents.
La transphobie persiste
Si l’évolution en faveur de la communauté LGBT+ dans la sphère professionnelle est indéniable, l’étude démontre toutefois que près de 3 répondants LGBT+ sur 10 (28 %) ont été victimes d’au moins une agression LGBTphobe. Parmi eux : plus de la moitié a entendu des expressions comme « enculé », « gouine », ou encore « travelo ». Mais 39 % des victimes de moqueries désobligeantes ou de propos vexants disent garder le silence. Ces violences sont exacerbées à l’égard des personnes transgenres et non-binaires.
En effet, 35 % d’entre elles constatent des traitements inégaux dans le déroulement de leur carrière, et 37 % indiquent avoir subi au moins une agression sur leur lieu de travail. En cas de « coming-out » (annonce volontaire d’une orientation sexuelle ou d’une identité de genre) d’un collègue transgenre ou non-binaire, les collègues non-LGBT+ semblent plus « mal à l’aise » que pour un collègue homosexuel. Ce contexte non inclusif pousse les personnes transgenres et non-binaires à renoncer à indiquer le nom de leur conjoint sur leur mutuelle ou à participer à un évènement professionnel où les conjoints sont invités.
Pour remédier à cette situation, Catherine Tripon recommande de mettre en place des campagnes de sensibilisation et des formations pour de meilleures pratiques ; de communiquer sur l’engagement de l’entreprise autour de ces sujets ; de soutenir le développement de réseaux en interne ; d’adapter les avantages sociaux aux besoins de ces salariés. En somme, de déployer une politique « Tolérance Zéro » à l’égard des remarques et comportements LGBTphobes au travail. Formés, les managers seront en mesure d’accueillir la parole des collaborateurs-victimes de LGBTphobie, et éventuellement de les rediriger vers un référent dédié, tandis qu’ils auront la responsabilité de recadrer, voire de sanctionner, les collaborateurs-agresseurs.
Afin de s’inscrire dans une dynamique LGBT-Friendly, plus de 250 organisations françaises publiques ou privés – comme Allianz, BNP Paribas, Casino, France Télévisions, Google, L’Oréal, ou encore Nestlé – avaient signé la Charte d’Engagement LGBT+ de L’Autre Cercle au 31 décembre 2023. Une initiative qui touche plus de 2 millions d’employés en France. « Si le sujet n’est pas pris à bras-le-corps dès l’école, alors l’entreprise doit s’en charger, car l’inclusion n’émergera pas d’elle-même », termine Catherine Tripon.
*Le quatrième Baromètre LGBT a été publié par L’Autre Cercle et l’IFOP, avec le soutien de la DILCRAH et de BNP Paribas, le jeudi 25 avril 2024. Cette étude a été réalisée par questionnaires auto-administrés en ligne du 24 janvier au 20 février 2024 auprès d’un échantillon représentatif de 8 997 salariés et/ou agents âgés de 18 ans et plus résidant en France, dont 1 027 LGBT+. Et du 22 janvier au 14 février 2024 auprès d’un échantillon de 43 252 salariés et/ou agent travaillant dans 83 organisations signataires de la Charte d’Engagement LGBT+ L’Autre Cercle, dont 6 915 LGBT+.