En juillet 2024, « Vice-Versa 2 » est devenu le plus grand succès de l’histoire des studios Pixar. Quelques semaines seulement après avoir enregistré le meilleur démarrage de l’année en France, avec près de 530 000 entrées, tout en se hissant en tête du box office. Lors de la sortie du premier volet en 2015, adultes et enfants découvraient cinq émotions (joie, tristesse, colère, peur et dégoût) incarnées par de petits personnages colorés. Ce sont les « émotions primaires des êtres humains », rappelle Agathe Altounian, psychologue du travail au sein du cabinet Ekilibre. « La joie stimule notre engagement, la tristesse nous connecte à notre humanité, la colère alimente notre détermination, la peur nous pousse à la prudence, et le dégoût maintient nos standards élevés. » 9 ans plus tard, nous découvrons 4 nouvelles émotions, très présentes dans la sphère professionnelle. Alors, comment les identifier ? Et les gérer au travail ?
1. Anxiété
L’anxiété est une émotion « désagréable, voire déstabilisante à forte dose », explique Agathe Altounian. Il est possible de la repérer à travers des symptômes physiques comme un rythme cardiaque rapide ou des sueurs sur le front. Dans le cadre du travail, lorsque cette anxiété « devient chronique, elle finit par impacter durablement le bien-être mental et physique des employés », poursuit la professionnelle en santé mentale. Pour éviter ce genre de situation, elle suggère au manager « d’être attentif aux signaux faibles, en observant le langage non verbal de ses équipes, et en leur proposant des points réguliers tout au long de l’année. C’est l’occasion d’écouter activement ses collaborateurs, ainsi que de leur poser des questions ouvertes pour connaître leur état d’esprit », dit-elle. A titre plus personnel, « le salarié anxieux peut entamer un travail de fond en se faisant aider par un psychologue du travail, en mettant en place des exercices de respiration, ou en cherchant du soutien auprès de ses collègues ou de ses proches. »
2. Embarras
L’embarras est une émotion différente qui consiste à se « sentir exposé au regard d’autrui, à se sentir jugé négativement, à être mal à l’aise par rapport à quelque chose qui peut être dit ou fait. C’est la crainte de faire une erreur, de paraître incompétent, d’être critiqué, voire humilié », détaille-t-elle. Conséquence ? « Le salarié peut être dans l’évitement social, et voir sa confiance en lui se dégrader fortement ». Là encore, le manager peut jouer un rôle déterminant pour atténuer cette émotion trop encombrante. Selon Agathe Altounian, il peut « faire régulièrement des feedbacks positifs, en valorisant les efforts fournis par les membres de son équipe, tout en leur indiquant les axes d’amélioration ». Pour ce faire, il est recommandé d’éviter le « c’était bien, mais… » afin de favoriser le « c’était bien, et… ». Cela revient à trouver le juste équilibre entre bienveillance et exigence. Le salarié embarrassé, lui, a tout intérêt à « se juger moins sévèrement, en acceptant ses erreurs et en se concentrant sur tout ce qu’il a fait de bien », ajoute-t-elle.
3. Ennui
Si l’ennui peut être un terreau de créativité, « il peut également être aussi grave qu’un burn-out », alerte la psychologue du travail. En précisant : « Cela s’appelle un bore-out, ce qui revient à un désintérêt pour ses missions professionnelles, tout en entraînant une perte de motivation, de sens, et d’engagement au travail. Tout cela conduit à procrastiner, voire à s’absenter pour une maladie de courte ou longue durée« . Aussi, pour (re)stimuler ses collaborateurs, le manager « peut tenter de réguler leur charge de travail, pour qu’ils ne se retrouvent pas sans rien lors de la baisse de l’activité, diversifier leurs tâches pour éviter la redondance, voire leur proposer des formations pour leur permettre de développer de nouvelles compétences. Quant au salarié, il doit toujours rester pro-actif, dans la recherche d’actions à mener. »
4. Envie
Enfin, l’envie est une « réaction émotionnelle d’une personne qui constate qu’une autre personne a ce qu’elle voudrait posséder, ou bien a accompli ce qu’elle aimerait accomplir. Cette sensation de manque, de privation, ou de frustration peut engendrer deux conséquences positive ou négative : soit de la motivation pour améliorer ses propres performances, atteindre des objectifs similaires. Ou, des conflits, car la personne envieuse cherchera à dévaluer l’autre, entreprendra des actions destinées à réduire l’écart supposé avec la personne jalousée. A moyen terme, ces comportements ou pensées détérioreront la relation interpersonnelle en place, créera une mauvaise ambiance au sein d’une équipe, en raison d’une grande compétitivité mal gérée ». Le manager peut alors « contribuer à ce qu’il n’y ait pas de comparaison entre collègues en valorisant les forces de chacun, et en organisant des évènements fédérateurs », dit-elle.
Pour conclure, ces 4 émotions seront vécues différemment d’un individu à l’autre. « C’est une question de perception liée à un cadre de référence donné, souligne Agathe Altounian. Chacun est le fruit de son histoire, de ses bonnes et mauvaises expériences. » Mais toutes les émotions, d’après elle, sont complémentaires et indispensables à la construction d’un individu. « Elles sont parfois désagréables, certes, mais elles permettent d’évoluer personnellement et professionnellement. Nous ne pourrions pas complètement nous en passer, nous en avons besoin pour nous forger. C’est constructif », termine-t-elle.
Crédit photo : © 2023 Disney/Pixar. All Rights Reserved.