Manager toxique
Carrière

« Pourquoi ça tombe sur moi ? » : comment ne plus subir les managers toxiques

Si les entreprises sont plus vigilantes à l'égard des comportements toxiques, notamment de la part de supérieurs hiérarchiques, certains continuent de sévir. Adeline Perez, autrice du livre 'Managers toxiques : mode d'emploi' (Hachette), explique comment mettre fin à ces relations néfastes au travail. En commençant par s'observer soi-même.

Tout salarié peut se retrouver confronter à un manager toxique au cours de sa carrière. C’est-à-dire à une personnalité qui multiplie les paroles ou comportements nuisibles à l’égard d’un ou de plusieurs membres de son équipe. Au point que ses actions finissent par affecter profondément et durablement la santé mentale des collaborateurs. « Certains salariés s’y retrouvent confrontés plus fréquemment que d’autres. Ils sont des cibles idéales pour les managers toxiques », alerte Adeline Perez, autrice du livre Managers toxiques : mode d’emploi (Hachette), publié en août 2024, et fondatrice du compte Instagram Un amour de chef. Alors, comment savoir si on est la « victime parfaite » ? Et surtout comment s’en sortir ? Tout en évitant de répéter ces schémas relationnels dans d’autres entreprises ?

Manque d’estime de soi

Les salariés en proie à un manager toxique ont des caractéristiques similaires telles que : ne pas poser de limites (par peur de se faire réprimander ou licencier) ; ne pas exprimer leurs opinions (pour ne pas déranger ou éviter les conflits) ; être dociles, tolérants et généreux ; manquer d’estime de soi (douter de son potentiel, rechercher la reconnaissance d’autrui). « Tout cela est le résultat de mécanismes inconscients » explique l’autrice. Dans cet ouvrage, la psychologue Elodie Bonetto indique que « la souffrance au travail, même si elle est dure, peut être familière et rappeler à une personne un abus (…) Si elle a intégré depuis l’enfance qu’elle ne mérite pas d’être bien traitée, son mode par défaut sera d’endurer cette souffrance. »

Si, parfois, certains salariés se complaisent dans ce rôle, car ils en tirent des « bénéfices secondaires, comme attirer l’attention des autres, bénéficier d’une protection particulière », poursuit Adeline Perez, d’autres n’ont tout simplement pas les ressources suffisantes pour quitter un travail qui ne leur plaît pas ou un environnement nocif. Il peut aussi arriver qu’ils manquent d’énergie (car ils sont en dépression ou en burn-out) ; aient perdu confiance en eux (et redoutent de ne pas être recrutés ailleurs) ou encore aient peur de l’inconnu (et craignent que ce soit pire s’ils partent). « Le fait de ne pas chercher de solution concrète est une manière d’éviter de se confronter au changement stressant que cela imposerait, comme affronter le conflit, démissionner, ou devoir chercher un autre emploi », décrypte Elodie Bonetto.

Sortir du sentiment d’impuissance

Mais accepter cette situation est justement « une partie du problème », selon Adeline Perez : « Nous renonçons au pouvoir que nous avons de modifier une situation en nous persuadant qu’il n’y a rien à faire pour la changer. » Aussi, pour ne plus subir, il est important de prendre conscience de sa propre histoire et de sa posture personnelle à l’égard du monde extérieur. Ensuite, d’apprendre à mettre des limites et à se poser les bonnes questions, comme : « Suis-je capable de savoir quand une situation n’est pas ok pour moi ? Suis-je capable de me positionner, de m’affirmer, et surtout de dire « non » quand cela n’est plus ok ? »

Il peut être également judicieux de pointer immédiatement du doigt une parole ou un comportement inapproprié, ou encore de communiquer ultérieurement avec le manager concerné, afin de sortir d’un sentiment d’impuissance mis en place par cette relation de domination. Cela peut être à travers des phrases simples : « Merci de m’avoir demandé de traiter ce dossier, mais je suis déjà débordée. Peut-être une autre fois », « Je voudrais prendre le temps de discuter de toutes les possibilités pour voir laquelle est la plus adaptée », « D’habitude je suis d’accord avec toi, mais pas sur ce point. »

Rompre l’isolement

Si cette discussion avec le manager toxique n’est pas possible, ou ne permet pas de trouver une issue favorable pour les deux parties, alors il est essentiel de « sortir de son isolement », recommande l’autrice, et d’aller en parler à un référent harcèlement, aux ressources humaines, au psychologue du travail, ou encore aux syndicats. Certaines entreprises, désireuses de lutter contre les comportements toxiques, mettent également à disposition des salariés des lignes téléphoniques indépendantes permettant de lancer des alertes. Celles-ci débouchent sur des enquêtes internes et mènent à de potentielles sanctions.

Après cela, si la situation reste en statu quo, voire que l’étau de la solitude se referme, il faut recourir à une prise de recul afin de se détacher des sentiments éprouvés sur l’instant : « Est-ce que dans 10 ans, cela sera encore important ? » Ou commencer à réfléchir à changer d’entreprise en reconsidérant ses aspirations pour la suite, en essayant de tirer du positif de cette expérience professionnelle douloureuse : « Nous pouvons beaucoup apprendre d’un mauvais supérieur, termine l’autrice. Sur nous-même et notre capacité à rebondir, sur les situations qui ne nous conviennent plus, sur la personne que nous ne serons pas si nous devenons manager à notre tour ». Adeline Perez recommande ensuite d’être attentif aux red flags (signaux négatifs) envoyés par l’entreprise suivante de sorte à être en phase avec la culture instaurée.

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