Tendance venue des pays anglo-saxons, les afterworks ont été fortement plébiscités en France avant d’être délaissés depuis quelques années. Aujourd’hui, d’autres pratiques semblent se dessiner. Décryptage
Aller boire un verre avec son patron et ses collègues serait apprécié par les salariés français mais beaucoup moins ancré dans leurs habitudes. C’est en tous cas le constat effectué par Privateaser et J’aime ma boîte dans un sondage réalisé conjointement et publié en 2017. Si 60 % des personnes interrogées considéraient en effet que l’afterwork était indispensable au bien-être en entreprise, seulement 42 % affirmaient le pratiquer régulièrement (de une fois par mois à une fois tous les trimestres).
Pour les réfractaires, les freins semblent nombreux : trajets importants pour rentrer chez soi, des enfants à s’occuper ou encore simplement le manque d’envie d’aller trinquer avec son supérieur. Et lorsque ce type d’événements est organisé par l’entreprise, certains salariés peuvent toutefois se sentir obligés de participer et ne pas se sentir à l’aise. “Plus c’est formel, plus il y aura cette notion d’obligation et moins les salariés s’intégreront et échangeront, souligne Sybille Persson, professeur à ICN Business School, experte en RH et en organisation. Alors que fédérer reste le principal objectif des afterworks.”
Et si les entreprises ont toujours à cœur d’organiser des moments où l’ensemble des salariés se retrouvent, elles sont de moins en moins friandes des afterworks, et ce pour plusieurs raisons. “Déjà parce que cela coûte cher : il faut louer une salle ou privatiser un lieu, prévoir un buffet et des boissons, décrypte Sybille Persson. Puis, pour l’employeur, il est vraiment difficile de mesurer l’apport en matière de motivation des équipes. Du coup, en période de vaches maigres, les entreprises ont tendance à abandonner cette pratique.” En effet, elles ne sont plus que 13 % à dédier un budget à ce genre d’événements.
Aujourd’hui, si les salariés souhaitent se retrouver autour d’une bière ou d’un verre de vin, c’est à eux d’impulser le mouvement… Plus globalement, les employeurs semblent accorder plus d’importance au bien-être général de leurs équipes et moins à des événements fédérateurs axés sur l’amusement, comme le sont les afterworks. D’après Sophie de Menthon, fondatrice de l’événement J’aime ma boîte et présidente du mouvement Ethic, il y a un virage très net opéré par les entreprises. “Désormais, des cours de gym, de yoga ou même pour arrêter de fumer sont proposés à l’heure du déjeuner, au sein même des locaux des sociétés. Autre exemple : elles sont de plus en plus nombreuses à supprimer les distributeurs de sucreries au profit de corbeilles de fruits”, affirme-t-elle. Si les entreprises ne souhaitent plus réunir régulièrement leurs équipes autour d’un verre d’alcool, c’est aussi parce qu’un certain nombre de dérives ont eu lieu. “On a reproché aux entreprises que ces rendez-vous sont trop alcoolisés et qu’elles s’étaient transformées en Club Med. Elles sont nombreuses à avoir fait machine arrière”, précise Sophie de Menthon. Autre constat : il est de plus en plus difficile de mobiliser les salariés en fin de journée ou en début de soirée.
Le beforework, nouvelle tendance ?
En effet, sur la proportion des personnes qui ne participent jamais à un afterwork, 74 % rentrent directement chez elles. “C’est assez culturel. Le phénomène de l’afterwork vient du monde anglo-saxon où les salariés sont plus extravertis. Et avec les nouvelles générations qui arrivent en entreprise, la vie privée importe plus. Les salariés ont à cœur de conserver leur espace personnel”, estime Sybille Persson.
Une tendance qui va de pair avec un nouveau phénomène, venu également d’outre-Atlantique, appelé “miracle morning” ou “beforework”. L’idée ? Se lever deux heures plus tôt afin de prendre du temps pour soi avant d’aller au travail, que ce soit via une activité sportive, manuelle ou en rejoignant des collègues. D’ores et déjà en France, plusieurs sociétés proposent des événements à destination des particuliers mais aussi des entreprises comme We are the morning, Daybreaker ou encore Creative Mornings. “C’est une tendance qui se déploie mais qui reste encore une pratique individuelle, à l’initiative du salarié. Dans les entreprises, des petits-déjeuners sont déjà organisés mais la pratique a du mal à prendre tout simplement car nous sommes moins matinaux que nos voisins européens ou que les anglo-saxons”, insiste Sybille Persson.
“Que ce soit les afterworks ou le beforworks la problématique reste la même : c’est avant tout une question générationnelle et de situation familiale”, affirme de son côté Sophie de Menthon. Pour parvenir à fédérer efficacement, Sybille Persson conseille aux entreprises de réunir leurs salariés à l’heure du déjeuner. “Les équipes apprécient car c’est sur le temps de travail et il est plus simple pour eux de s’organiser.”
3 conseils pour réussir son “afterwork”
1/ Ne multipliez pas les rendez-vous dans l’année.
2 / Organisez un événement pour célébrer une réussite ou un anniversaire cher à l’entreprise. Une bonne solution pour fédérer les équipes.
3 / Privilégiez le temps du midi. Cela reste moins contraignant pour les salariés qui viennent de loin ou qui ont des obligations familiales.