Les cadres du secteur privé continuent de réévaluer leurs aspirations professionnelles pour les années à venir. « La majorité travaille déjà dans de bonnes conditions, mais ils souhaitent aller plus loin dans cette amélioration », commente Flora Baumlin, directrice de l’expérience professionnelle à l’Ifop. Et cela passera principalement par l’adoption d’une organisation de travail plus souple et plus hybride, d’après l’étude* réalisée conjointement par l’Ifop et Freelance.com, publiée ce mardi 18 juin. « Les cadres aspirent à plus de flexibilité, de liberté, d’autonomie, et d’indépendance. Cela leur permet notamment de concilier leur vie personnelle et professionnelle », complète Jean-Hugues Zenoni, vice-président de Freelance.com.
Ce gain de souplesse est toutefois difficilement envisageable dans de nombreuses grandes entreprises. Conséquence ? 56 % des cadres pourraient se tourner vers des petites entreprises dans les 5 prochaines années. Ce chiffre grimpe à 72 % pour les cadres travaillant déjà dans des entreprises de moins de 250 personnes. « Les grandes structures sont perçues par certains comme trop verticales, uniformes, et écrasantes. Cette hiérarchie forte les empêche de se sentir épanouis au travail, poursuit le dirigeant. A l’inverse, les petites organisations mettent en place des cycles de décisions plus courts, donnent plus de responsabilités aux collaborateurs, et prennent davantage soin d’eux. Ces processus de travail répondent davantage à leurs besoins de liberté, de sens, d’appartenance ainsi que de reconnaissance. »
Exit le statut de salarié ?
Pour une partie des cadres, ce désir d’indépendance pourrait aller jusqu’à abandonner leur statut de salarié. Depuis plusieurs années, ils collaborent davantage avec des travailleurs indépendants, ce qui engendre un double phénomène : leur vision concernant ces freelances évolue positivement, mais leur donne également des idées de changement de projet professionnel. « Certains cadres pourraient quitter leur entreprise afin de lancer leur propre activité, et ainsi gagner en impact sur le monde qui les entoure », explique Flora Baumlin. S’ils expérimentent ou prévoient d’expérimenter ce nouveau mode de travail, « il n’y a toutefois rien de définitif dans ce choix. Ils n’excluent pas de revenir en entreprise », précise-t-elle.
En effet, aspirer à un nouveau projet professionnel est une chose ; franchir le cap et se confronter à la réalité en est une autre. Le contexte inflationniste fait partie de cette réalité qui n’épargne pas la population de cadres en 2024, pourtant dotés de revenus plus élevés que la moyenne. Cette préoccupation a augmenté de 24 points depuis 2021, ce qui les rend « prudents », souligne Flora Baumlin. « Cette situation a une influence notoire sur leurs attentes, leurs projections futures, et ralentit leurs prises de risque, mais ne les empêche pas pour autant de sauter le pas. »
Autres freins potentiels ? Les défis que représente l’adoption d’un tel statut, à savoir une potentielle baisse de revenus ; une absence de revenus mensuels garantis ; ou encore de nombreuses contraintes administratives. C’est pourquoi, d’après cette étude, une alternative se fraye un chemin : celle du portage salariale, conjuguant l’indépendance du freelance et la sécurité du statut de salarié. 71 % déclarent en avoir une bonne image, tandis que 36 % sont prêts à l’expérimenter dans les 5 prochaines années.
Cette étude, comme de nombreuses autres, rappelle que les trois principales raisons qui poussent les cadres à quitter une entreprise restent : une rémunération jugée insuffisante ; un management empreint d’injonctions contradictoires ; et enfin, un manque de reconnaissance en dépit des efforts fournis.
*Cette sixième édition de l’étude menée conjointement par l’IFOP et freelance.com a été réalisée du 5 au 13 février 2024 auprès de 1 006 personnes représentatives de la population cadre âgée de 18 ans et plus.