Tribune – Vous êtes directeur juridique ? Directeur des ressources humaines ? Posez-vous la question : combien de temps consacrez-vous à la rédaction de vos documents juridiques ? 50 % de votre temps de travail ? 60 % ? Plus ? Moins ? Par Meysa Sy, juriste tech chez Cassius Avocats.
Au regard des bouleversements numériques que nous vivons, s’interroger sur l’ensemble des pratiques internes en entreprise devient essentiel. Optimiser, rationaliser, simplifier et automatiser constituent désormais les mots clés des stratégies de transformation des entreprises.
En France, il existe actuellement quelques start-up du droit qui se consacrent exclusivement à l’automatisation de documents juridiques. Mais de quoi parlons-nous exactement ?
Modèle n°1 : S’agit-il d’utiliser une plate-forme qui met à la disposition des entreprises un certain nombre de documents juridiques qu’il est possible de personnaliser via un questionnaire “intelligent” ?
Modèle n°2 : S’agit-il de la possibilité pour l’entreprise de transmettre des documents à une start-up qui se charge de les automatiser à leur place ?
Modèle n°3 : S’agit-il de mettre à la disposition des entreprises, une solution qui permet à ces dernières d’automatiser “eux-mêmes” leurs propres documents ? Quelle est la différence entre ces modèles d’automatisation ? Surtout, qu’est-ce que cela implique réellement d’un point de vue technique ? Voici quelques éléments de réponse.
Le modèle n°1 est celui qui a émergé en premier sur le marché de la Legaltech en France. Rappelons que cette forme d’automatisation nous vient, à l’origine, des États-Unis. En effet, des entreprises américaines ont très tôt compris l’intérêt d’automatiser des documents juridiques en créant un questionnaire permettant aux clients d’y répondre de la manière la plus simple qui soit. À la fin du questionnaire, le document est automatiquement créé et le client n’a plus qu’à le télécharger. La seule contrainte de ce modèle est que son succès dépend entièrement du nombre et de la qualité des documents proposés par le prestataire. Les start-up qui proposent ce modèle aujourd’hui essaient de fournir le plus grand nombre de documents juridiques, quitte à parfois sacrifier la qualité de ces derniers. Techniquement, pour le prestataire qui propose ce service, la tâche n’est pas des plus compliquées dans la mesure où il a la maîtrise totale de sa base de données, avec des documents automatisés une fois, puis mis à disposition du plus grand nombre. C’est ce qui explique le foisonnement de start-up utilisant ce modèle-ci.
Avantages : le nombre et la variété des documents juridiques.
Inconvénients : l’impossibilité pour le client d’automatiser ses propres documents.
Le modèle n°2 est proposé depuis peu et permet (en plus du modèle n°1) au client d’avoir la possibilité de voir son propre document automatisé par le prestataire. Ce service a une forte valeur ajoutée dans la mesure où le client saisit assez rapidement l’intérêt de bénéficier de ce procédé “industriel”. La principale difficulté de ce modèle tient au fait qu’il apparaît essentiel pour l’entreprise prestataire de travailler en collaboration avec le client dans la réalisation de l’automatisation des documents. En effet, seul le client est en mesure de pouvoir exprimer le contenu du futur questionnaire lié à chaque document. Dans ce modèle, le client devient l’expert. Il doit accompagner le prestataire tant dans la mise en œuvre du contenu juridique du document (appliquer par exemple telle clause dans tel cas, en supprimer d’autres dans telle ou telle situation, etc.) que dans l’élaboration du questionnaire. Concrètement, cela peut se traduire par un délai d’intégration qui peut être plus ou moins long.
Avantages : l’automatisation des documents juridiques du client
Inconvénients : les délais, la collaboration avec le prestataire, les éventuels ratés.
Le modèle n°3 est nécessairement le plus abouti dans la mesure où il permet au client de procéder tout seul à l’automatisation de ses documents juridiques. Nous sommes ici dans le “Do it yourself”, c’est-à-dire sans intervention de l’entreprise prestataire. Cette dernière conçoit donc une solution autonome qui est en mesure de prendre en compte tous les besoins du client en matière d’automatisation de document. Concrètement, le client a la possibilité d’intégrer son document juridique dans la plate-forme qui lui permettra de construire son questionnaire comme il le souhaite. Ce modèle nécessite généralement du temps pour la prise en main de l’outil. Enfin, passé cette étape d’apprentissage, l’automatisation d’un document par le client peut aller très vite et toucher tous les domaines d’activité de l’entreprise (juridique bien sûr mais aussi commercial et bien d’autres).
Avantages : l’autonomie du client, le gain de temps (pas de délais), la maîtrise de l’ensemble du processus
Inconvénients : la prise en main de l’outil, son ergonomie doivent être simplifiés au maximum pour que le client puisse automatiser ses documents rapidement
En définitive et quel que soit le modèle, l’utilisation d’une solution d’automatisation de documents tend à s’imposer auprès des entreprises qui prennent de plus en plus conscience de la valeur ajoutée qu’une telle solution peut leur apporter.