Dans une étude parue en janvier 2023, l’Apec et Pôle emploi dressent le portrait statistique des demandeurs d’emploi cadres. Des données qui confirment les dynamiques à l’œuvre, de la plus grande volatilité des jeunes cadres à la situation des seniors, en passant par une période de chômage plus profitable que pour les non-cadres.
L’emploi cadre se porte bien, à tel point que des pénuries de candidatures et de fortes tensions de recrutement s’installent dans tous les secteurs ou presque. Et pour cause, parmi les premiers grands enseignements mis en avant par le portrait statistique des demandeurs d’emploi cadres réalisé en partenariat par l’Apec et Pôle emploi, le taux de chômage des cadres est de 4,1 %, soit presque deux fois moins que le taux de chômage global de 7,9 %. « C’est une situation de quasi plein emploi qui se ressent dans les difficultés de recrutement, observe Adrien Scemama, country manager de Talent.com, moteur de recherche d’emploi, le coût à la candidature ne fait qu’augmenter et il y a une raréfaction généralisée des candidats ».
L’étude dénombre 485 000 demandeurs d’emploi cadres en juin 2022, dont 36 % de chômeurs de longue durée (plus de 12 mois d’inactivité) et 21 % de 55 ans et plus.
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Chômage de courte durée
La case chômage connue par les cadres est moins subie que pour les profils non-cadres. En premier lieu parce que la période de chômage est le plus souvent de courte durée : 51 % des demandeurs d’emploi cadres inscrits entre juin 2020 et septembre 2021 ont accédé à un emploi dans les six mois, contre 43 % dans les autres catégories de salariés. Mais aussi parce que les cadres bénéficient plus souvent d’une allocation chômage (78 % contre 69 % en moyenne) et sont mieux indemnisés (2 200 euros en moyenne). « Nombre de cadres préfèrent aujourd’hui démissionner ou solliciter une rupture conventionnelle si leur activité ne leur convient pas, le marché est porteur et les cadres savent qu’ils auront sans doute peu de difficultés à retrouver un poste ailleurs, et souvent avec une meilleure rémunération », explique Adrien Scemama. Parmi les tendances observées par la plateforme Talent.com : celle du « job hopping » qui consiste à changer régulièrement d’entreprise et de poste pour bénéficier d’augmentations régulières s’installe dans le paysage. « Le rapport de force entre salariés et entreprise s’est inversé, les cadres veulent être plus libres et autonomes. Ils ne sont plus patients comme auparavant », ajoute le spécialiste du recrutement.
La période de chômage est donc pour beaucoup de cadres un temps de reconversion ou de transition choisi (18 % des inscrits en juin 2022 l’étaient après une rupture conventionnelle). Et les cadres entrent plus souvent en formation pendant leur période de recherche d’emploi que les autres profils salariés.
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Le cas des seniors
Toutefois, si les cadres sont moins exposés aux longues périodes de chômage, l’accès à l’emploi cadre reste encore difficile pour certaines populations. À commencer par les jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et les seniors âgés de 55 ans et plus. « On peut parler d’une forme de discrimination à l’embauche envers les seniors, affirme Adrien Scemama, les profils de cadres seniors sont plus expérimentés et donc plus chers pour les entreprises, ils sont aussi moins mobiles ». De fait, les seniors cadres sont exposés à des périodes de chômage de plus longue durée : 71 % d’entre eux n’ont pas retrouvé un emploi après 6 mois d’inactivité, et 62 % au bout d’un an.
Un enjeu fort de l’emploi cadre dans les mois et années à venir sera donc l’état d’esprit des directions d’entreprises vis-à-vis des seniors, notamment avec la réforme des retraites à l’œuvre. « Il y a un vrai blocage au niveau des recruteurs qui rechignent à s’investir et à investir sur des profils cadres plus âgés », confirme le dirigeant de Talent.com.