Depuis plus d’un an, le CPF a remplacé le Dif. L’objectif, simplifier l’accès à la formation pour les salariés, les chômeurs mais également pour les apprentis. Bilan.
Accéder plus facilement à un panel plus large de formations. Voilà la promesse du compte personnel de formation (CPF) lancé le 1er janvier 2015. Remplaçant le droit individuel à la formation (Dif), ce nouveau système permet l’accès à l’ensemble des informations concernant la formation (nombre d’heures créditées mais également sur le financement) via un espace personnel et sécurisé*. “Aujourd’hui, les derniers chiffres montrent qu’il y a 2,8 millions de personnes qui ont activé leur compte CPF, indique William Hurst, directeur executive educative and MBA d’Audencia Groupe. Ce qui représente un peu moins de 10 % de la population qui aurait pu le faire (environ 21 millions de personnes). C’est encore très peu. Il faut vraiment que les salariés prennent conscience d’une chose : la formation continue c’est, certes, l’affaire de l’entreprise, mais également la leur.” Pourtant, sur le papier, le CPF aurait bien des avantages. D’abord, contrairement au Dif qui ne concernait que les salariés en poste, le compte personnel de formation a été élargi aux demandeurs d’emploi, aux apprentis et devrait être bientôt ouvert aux fonctionnaires et aux indépendants. Une évolution non négligeable qui est due au fait que le CPF est désormais lié à la personne tout au long de sa carrière, jusqu’à la retraite. “Le CPF n’a plus de lien avec l’entreprise, indique Tatiana Morot, responsable des départements management chez EFE Formation. Ce qui n’était pas le cas du Dif. Car même s’il était affecté au salarié, lorsqu’il changeait d’entreprise, le Dif ne le suivait pas. Et même s’il existait une portabilité, cela s’avérait trop complexe pour les employeurs qui ne la mettaient pas en œuvre.” Surtout, l’employeur avait la possibilité de refuser la demande de formation du salarié, “que ce soit sur son temps travail ou pas, indique Jérôme Lesage, fondateur et PDG de Place de la Formation. Aujourd’hui, l’entreprise peut toujours refuser dans le cadre du CPF, mais seulement si le salarié veut effectuer sa formation sur ses heures de travail. Sur son temps libre, l’individu n’a aucun compte à rendre à son employeur et c’est un véritable plus.”
Des heures de formation plus importantes
Autre évolution, le CPF peut être crédité de 150 heures au maximum contre 120 heures pour le Dif. Chaque année, un salarié à temps plein cumulera 24 heures de formation jusqu’à 120 heures, puis 12 heures jusqu’à 150 heures. Par ailleurs, le projet de loi qui a porté le CPF prévoit que le compte personnel du salarié soit abondé de 100 heures supplémentaires si l’employeur ne respecte pas un certain nombre de critères. “Tous les trois ans, un bilan est fait et si le salarié n’a pas eu de promotion, d’action de formation ou d’entretien professionnel, il bénéficiera de 100 heures de formation de plus sur son CPF, à utiliser comme il le souhaite, détaille William Hurst. Mais c’est seulement de la théorie pour le moment, le premier bilan étant dans trois ans. Et puis une entreprise n’a pas d’intérêt à ce que ça arrive. Un employeur n’a que des bénéfices à former ses salariés.” À savoir que toutes les heures cumulées dans le cadre du droit individuel à la formation sont utilisables jusqu’en 2020.
Des formations certifiantes et diplômantes
Surtout, les formations éligibles dans le cadre du CPF visent à délivrer des diplômes. “Proposer des formations certifiantes et diplômantes est l’une des évolutions majeures apportées par le CPF. Car le Dif était, quant à lui, utilisé pour des formations de courte durée”, souligne Tatiana Morot. Ainsi, le CPF ne prendra que rarement en compte les formations de deux ou trois jours. “Cela veut dire que le salarié a désormais un choix restreint, déplore Jérôme Lesage. C’est un vrai bénéfice qu’avait le Dif : être ouvert à toutes les formations. Aujourd’hui, si un individu veut effectuer des cursus courts, il doit se les payer ou passer par son entreprise et le plan de formation globale.” Pour savoir quels sont les programmes qui sont pris en charge dans le cadre du CPF, une simple connexion sur le compte en ligne est suffisant. “Le nombre de formations disponibles est assez large, assure William Hurst. Et il y a même eu des évolutions depuis le début du projet de loi puisqu’au départ, les formations linguistiques (pour le Toiec et parfois le Toefl, dans certains cas) ne devaient pas être éligibles CPF et elles le sont finalement.”
Faire connaître le CPF
Mais le grand défi aujourd’hui reste de faire connaître ce dispositif auprès des salariés, qu’ils soient actifs ou non. Comme ce fut le cas pour le droit individuel à la formation. “Car si le Dif était connu de tous, il était mal connu, assure Tatiana Marot. Très peu de salariés savaient comment utiliser leurs heures de formation.” Pour Jérôme Lesage, le Dif était un dispositif désormais “bien rodé. Il avait mis du temps à s’installer mais une entreprise sur deux avait fini par se l’approprier”, souligne-t-il. Les démarches administratives liées au CPF restent, selon lui, un gros frein pour que le dispositif s’installe durablement auprès des salariés. “C’est un super système car il est aux mains de l’individu et non de l’entreprise, insiste-t-il. Mais les démarches liées au financement sont complexes. C’est un travail de gestion administrative difficile pour le salarié”, assure Jérôme Lesage. Le PDG de Place de la Formation assure que depuis l’instauration du CPF, les professionnels du secteur affichent une perte de chiffre d’affaires de 15 % à 20 %.“Même s’il y a eu une grosse publicité autour du CPF, encore peu de personnes sont informées sur le dispositif, admet William Hurst. Surtout, nombreux sont les salariés à ne pas savoir que c’est à eux d’activer leur CPF.”