Le recrutement inclusif et l’insertion en entreprise des personnes en situation de handicap est un défi qui reste à relever pour les entreprises. À l’occasion de la semaine européenne consacrée à ces enjeux, Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des Personnes handicapées, revient sur les avancées et les priorités de l’inclusion.
Quel regard portez-vous sur l’évolution récente de l’inclusion des personnes en situation de handicap en entreprise, avec notamment la baisse de leur taux de chômage (19 % en 2017 contre 13 % aujourd’hui) ?
En premier lieu, il faut dire que c’est une dynamique plutôt positive et satisfaisante. J’y vois deux explications. D’abord, c’est le signe qu’il y a de l’emploi en France et que la politique générale du gouvernement vis-à-vis de l’emploi porte ses fruits. Beaucoup d’offres d’emploi ne sont pas satisfaites aujourd’hui et les employeurs tendent à faire du sourcing en se tournant vers tous les publics, dont les travailleurs en situation de handicap. Ensuite, nous avons mis en place des dispositifs de formation et d’accompagnement qui permettent de faciliter l’intégration des personnes en situation de handicap dans l’emploi.
S’agissant des leviers d’inclusion et des outils mis en place, quelles sont les priorités ?
Nous devons développer la formation et outiller les formateurs pour une meilleure accessibilité à celle-ci. Il nous faut favoriser les passerelles vers l’emploi. Par exemple, le dispositif emploi accompagné permet de soutenir des personnes en situation de handicap, de les aider à entrer en formation et à trouver un emploi tout en acculturant l’entreprise au handicap en question. S’agissant des passerelles, nous pouvons citer les CDD tremplin, qui peuvent amener des travailleurs d’Esat, établissement et service d’aide par le travail, à être formés dans une entreprise adaptée pendant deux ans maximum pour ensuite s’insérer dans le milieu professionnel ordinaire. Chaque dispositif est à adapter en fonction de la volonté des personnes d’évoluer dans l’emploi, mais c’est avec ce genre de mesures que nous parvenons à améliorer l’insertion des personnes handicapées.
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Peut-on donc se satisfaire de ces évolutions ?
Je ne me satisfais de rien, mais l’évolution est notable. D’abord, je crois que le regard sur le handicap change, auprès des dirigeants d’entreprise notamment. Les entreprises qui accueillent des personnes en situation de handicap constatent que leur productivité n’a pas été impactée, au contraire. Et l’ambiance sociale est bien meilleure. Il reste des freins à lever et principalement des freins par méconnaissance. Avec le ministre du Travail Olivier Dussopt, nous avons demandé à l’Agefiph, association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, et à Cap emploi de mener un vaste travail de proximité d’information et d’accompagnement au niveau des TPE et PME. Celles-ci, présentes sur tout le territoire national, sont de grands pourvoyeurs d’emploi, mais souvent en manque de candidatures. Ce travail d’information et de soutien est primordial. On entend souvent que les dossiers de recrutements inclusifs sont complexes. Cela passera donc également par la simplification des démarches administratives pour les entreprises et les salariés.
La sensibilisation aux enjeux de l’inclusion et du handicap est-elle au cœur de la démarche du gouvernement ?
Absolument. La campagne de sensibilisation que lance le gouvernement à l’occasion de la semaine européenne pour l’emploi des personnes en situation de handicap est simple : la compétence d’abord. Chaque personne doit être évaluée à l’aune de ses compétences. 80 % des personnes en situation de handicap ont un ou plusieurs handicaps invisibles et de nombreux travailleurs ont développé un handicap au cours de leur carrière professionnelle. L’accent doit donc être mis sur les compétences, pour réorienter vers des formations et des emplois adaptés.
L’engagement des entreprises apparaît comme l’une des clés de l’inclusion, où en sommes-nous en matière de respect des quotas et de recrutement inclusif ?
L’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH) reste de 6 %. Dans la fonction publique, le taux moyen est de 5,44 %. Dans le secteur privé, il est de 3,5 %. Il faut continuer à encourager les recruteurs à faire du sourcing sur la base des compétences. La pénurie de candidatures les pousse dans cette direction. Employer des personnes en situation de handicap n’a pas d’impact sur la production de l’entreprise et c’est un levier vertueux pour les ressources humaines ainsi que les valeurs de solidarité.
Cette semaine européenne dédiée au travail et au handicap est une semaine d’information, de sensibilisation. Les entreprises qui innovent et performent en matière d’inclusion peuvent montrer l’exemple aux autres. Il nous faut rester actifs avec Pôle emploi, Cap emploi, l’Agefiph, qui sont des partenaires cruciaux pour l’emploi des personnes handicapées.
Quelles sont les perspectives de l’accompagnement du handicap dans le cadre du projet France Travail, un des grands chantiers du gouvernement en matière d’emploi ?
France Travail est en train de se structurer et jouera un rôle dans l’évaluation de l’employabilité des personnes en situation de handicap. Pour repérer les qualités propres de chacune et chacun, orienter vers des parcours professionnalisants puis permettre le maintien dans l’emploi. L’accès à l’emploi des personnes handicapées est un premier défi et le maintien dans l’emploi en est un autre.
J’aimerais aussi encourager chacune et chacun à prendre part à une belle initiative. Le 17 novembre se tient à nouveau le DuoDay. Une journée qui consiste à faire se rencontrer une entreprise ou autre structure pourvoyeuses d’emploi et un salarié potentiel en situation de handicap, pour une découverte du métier et une immersion en milieu professionnel. L’an passé, 17 % des participants ont trouvé une solution d’emploi grâce au dispositif.