Management

Entre bien-être et “bureau 2.0“ : comment les managers vont se réinventer

Suite à la crise, quels changement sont attendus dans l’organisation du travail, et qu’impliqueront-ils pour les managers ? Stéphanie Lecerf, DRH de PageGroup, nous présente une étude (1) menée avec l’IFOP et nous en dit plus sur le nouveau rôle des chefs d’équipe et le bureau de demain.

Quel enseignement principal tirez-vous de l’étude réalisée par PageGroup et l’IFOP en mars 2021 ?

Nous voulions analyser comment managers et RH se sont adaptés depuis début 2020 face à la crise en matière de méthodes de travail, puis les enseignements tirés, et les changements attendus demain dans l’organisation du travail. Certaines choses que nous pensions durables ne resteront pas, et inversement : tel est le constat de notre étude. Elle nous a appris que la crise a été un catalyseur et un accélérateur de tout ce qui était déjà en train de se mettre en place depuis longtemps, en ce qui concerne la digitalisation, le télétravail et l’utilisation de nouveaux outils. Elle a aussi fait évoluer les méthodes de travail et les aspirations des salariés. La majorité des entreprises s’interrogent désormais sur leur organisation du travail, du tertiaire à l’industrie. Et ont compris qu’il ne sera pas possible de revenir à la situation pré-Covid.

Dans ce contexte, les managers ont vu leur rôle se transformer. Ils ont eu un rôle clef pour garantir l’engagement comme la performance de leurs équipes. Après avoir dû s’adapter dans l’urgence, ils ont repensé leur mode de fonctionnement dans la durée et se sont réinventé, afin de maintenir les liens sociaux malgré la distanciation physique, être à l’écoute et s’assurer de la bonne santé, psychique comme physique, de collaborateurs parfois isolés. Avec les nouvelles organisations du travail qui se dessinent, ils seront de plus en plus amenés à développer leurs compétences du point de vue émotionnel et social ; pour mieux soutenir leurs équipes.

Concernant leurs méthodes de travail, les managers se sont transformés en confidents et en animateurs au quotidien pour les équipes à distance ou en présentiel. Auparavant l’apanage des fonctions RH, l’implication des managers sur les sujets tels que la prévention des Risques Psycho Sociaux (RPS) ou le maintien du lien social à travers un travail d’animation est ainsi devenue la norme. Ce déplacement de responsabilités auprès des collaborateurs les place davantage au centre que devant. Ainsi, la “bonne communication entre les collaborateurs et leur manager” ressort comme la condition prioritaire (23 %) pour assurer le bien-être et la performance des collaborateurs à distance, devant “la qualité des environnements de travail” (17 %).

La notion de bien-être en entreprise devrait être au centre de l’action des managers, de la santé physique des collaborateurs à leur santé mentale, en passant par le sens au travail et la RSE.

 

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Quels changements la crise pourrait-elle provoquer en matière d’espaces de travail ?

L’organisation des espaces de travail n’échappe pas non plus à ce chamboulement. Les salariés passeront beaucoup plus de temps en virtuel, même quand ils seront au bureau. Ils souhaitent travailler différemment, avec des environnements plus dynamiques, parfois calmes pour s’isoler, parfois favorisant la convivialité. Mais ils rejettent désormais le bureau permettant de tout faire au même endroit, sans décoller de la journée.

Des réflexions sont en cours chez les RH sur la réorganisation des espaces. Une organisation du travail hybride, alternant présentiel et distanciel semble être amenée à se pérenniser. Sachant que peu d’entreprises envisagent de rompre avec le travail en présentiel. Si avant la crise, une minorité s’était engagée dans de réelles évolutions des environnements de travail, elles sont aujourd’hui entre 60 % et 85 % à avoir mené ou à prévoir de mener des transformations. 43 % des DRH souhaitent accélérer le principe du flex-office, alors que seules 19 % des entreprises avaient lancé des actions en ce sens avant le Covid. En outre, 59 % ont engagé ou vont engager une réduction de la surface des locaux “plus radicale”, pour des raisons économiques, mais aussi écologiques.

Mais l’inconnu demeure : ces prochaines années, nous devrions voir beaucoup d’expérimentations, d’adaptations. Des tendances devraient s’accentuer, ou reculer. On assiste actuellement à une sorte de retour de “hype” du bureau ; là où il y a un an, tout le monde avait plus ou moins envie de travailler à la maison… Outre le flex-office, 2 entreprises sur 3 réfléchissent à la généralisation de bureaux avec un nombre restreint de collaborateurs, ou au contraire à des espaces collaboratifs. Avant de se projeter sur le “bureau 2.0”, les entreprises devront évaluer leurs besoins : tout dépendra de leurs activités et de ce que leurs salariés feront sur site. L’essentiel est que les espaces de travail seront davantage flexibles, dans leur utilisation comme dans leurs configuration.

 

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Pour revenir aux managers, en quoi ce changement d’organisation des bureaux va-t-il transformer aussi leur rôle ?

Le travail devenant hybride, le management devrait aussi devenir hybride. Les managers auront comme rôle de maintenir le lien social, sans créer de fossés entre ceux qui se trouvent au bureau et ceux qui travaillent de chez eux. S’ils ne s’adaptent pas et que les collaborateurs ont le sentiment que les choses ne se passent qu’au bureau, le travail hybride ne sera pas réel.

Le flex-office, s’il se développe, nécessitera la mise en place d’outils adaptés, et d’un mode de management permettant d’adapter aussi bien des collaborateurs à distance que sur site. L’enjeu, pour les RH notamment, sera de réussir à engager les managers, et à faire évoluer leurs pratiques. Le plus délicat sera pour ces derniers de trouver un équilibre dans la façon d’encadrer le travail des collaborateurs, entre leur présence sur site et la distance.

L’organisation du travail et des locaux nécessiteront finalement que les RH et les managers impliquent aussi les salariés eux-mêmes dans ces transformations.

 

(1) Etude IFOP pour PageGroup menée auprès de 501 décisionnaires RH dans des entreprises de plus de 50 salariés, entre le 15 et le 25 mars 2021.

 

 

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