Le réchauffement climatique n’est désormais plus un chiffon rouge agité par quelques scientifiques alarmistes. La pression écologique touche les entreprises qui doivent désormais composer face à l’opinion publique et éviter un greenwashing très mal vu. Dans ce contexte, les bureaux d’entreprise se réinventent sous la pression des labels. Mais à la clé, la possibilité de forts gains énergétiques.
Face aux problématiques écologiques, les bureaux d’entreprise trouvent un nouveau souffle salvateur. La réduction de l’empreinte carbone avec l’utilisation de matériaux bio-sourcés comme le bois massif ont permis à des immeubles neufs de voir le jour comme WoodWork à Saint-Denis ou l’Arboretum à Nanterre. Il en va de même pour les vieux bâtiments trop friands en énergie et peu adaptés aux contraintes actuelles. Le promoteur immobilier WO2, très actif sur ces sujets, ne pouvait faire autrement que de donner l’exemple.
“Notre siège, à Boulogne-Billancourt, a été réhabilité par la surélévation en bois d’un immeuble en béton des années 70”, explique Arielle Polaillon de chez WO2.
Pour les entreprises, outre toute la communication eco-friendly dont elles peuvent user, cette action vise surtout à réduire ses factures énergétiques.
“En TCO (total cost of ownership), un bâtiment écologique est bien plus efficace. L’entretien et les flux sont nettement moins coûteux”, analyse Alexandre Sevenet, président du groupe Nepsen, spécialisé dans les projets éconergiques.
Tout aussi concrètement, la biophilie a un impact favorable sur les salariés. “De nombreuses études ont montré que le contact des salariés avec la nature, les formes de la nature ou les systèmes naturels pouvait avoir un effet sur la réduction de l’absentéisme”, remarque Valérie de Robillard, directrice RSE chez Nexity où 47 % des opérations et environ 23 % des surfaces livrées durant l’année 2018 ont été en bois.
La valeur verte : un indéniable élément de différenciation
Certains experts insistent également sur la nécessité pour les entreprises d’agir plus globalement au travers de leurs bureaux.
“Un bâtiment écologique participe au développement des villes. Outre la réduction des émissions de gaz à effet de serre, cela permet surtout de soutenir l’innovation et favorise la résilience des bâtiments tertiaires. Tout une économie circulaire se met en place qui permet de lutter contre le gaspillage des ressources”, explique Valéry Hergott, consultant et formateur en stratégies RSE & carbone.
Néanmoins, les bonnes volontés peuvent se heurter au nombre incalculable de labels qui encadrent ces nouveaux bâtiments. Normes françaises, anglo-saxonnes ou américaines, les décideurs ne savent plus à quel saint se vouer.
Valérie de Robillard estime que tout cela est assez caractéristique du marché tertiaire de Paris et de la Défense : “Nous mettons sur le marché des bâtiments qui ont jusqu’à cinq labels de conception puis nous proposons d’autres types de labels à travers nos métiers. Cela n’a plus beaucoup de sens, même si l’idée sous-jacente est d’accéder aux attentes des investisseurs comme des preneurs à bail.”
Pour Thibaud Gagneux, président de l’association Synergiz, les promoteurs et investisseurs, conscients que la valeur verte peut être un indéniable élément de différenciation, intègrent simplement ces labels dans leur projet pour garantir à leurs clients, une qualité de réalisation, d’usage et d’exploitation. Certains experts estiment que les labels BDM/BDO/BDF (bâtiment durable méditerranéen, occitan, francilien) ont le vent en poupe car ils sont autant crédibles sur la forme que les labels internationaux connus (BREEAM, LEED, HQE) mais vont plus loin sur le fond.
“Ils sont mieux adaptés aux particularités locales et intègrent des critères RSE plus larges. De plus, ils sont largement soutenus par les pouvoirs publics de ces différentes régions, ce qui pousse les maîtres d’ouvrage à s’y conformer”, note Alexandre Sevenet.
Un greenwashing sans fondement
Cependant, la tentation pourrait être grande pour les entreprises de vouloir se parer de vert à moindre coût. Un greenwashing souvent décrié, mais dans ce domaine peu efficace d’après les experts.
“Le bâtiment de bureaux n’est pas une bonne aire de jeu pour le greenwashing corporate. Les labels, l’intérêt à réduire les coûts d’exploitation et la future réglementation environnementale à laquelle tout un chacun se prépare, sont passés par là”, note Valérie de Robillard.
Même constat pour Alexandre Sevenet : “Si on regarde la situation objectivement, il ne faut pas oublier que la pression réglementaire est de plus en plus forte d’une façon directe grâce aux réglementations sur la construction ou bientôt le futur décret tertiaire mais aussi indirecte, par les annexes vertes, les audits énergétiques des grandes entreprises ou les rapports RSE obligatoires.”
Et ce dernier de poursuivre : “Les entreprises cherchent à faire de ces contraintes des opportunités en communiquant sur leur démarche, c’est de bonne guerre !”
D’autant que les acteurs de la profession s’accordent pour dire que la prise de conscience généralisée conduit le management des entreprises à opérer des transformations indispensables. L’impulsion des générations futures fait ainsi évoluer les mentalités dans le bon sens.