Pour Muriel Pénicaud, l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est un outil qui “aide les entreprises à progresser”. Malgré des premiers résultats mitigés, celles-ci seraient en pleine “émulation”. Mais du côté des PME, qui devront dévoiler leurs notes en mars 2020, la situation reste complexe.
“Mon rêve, c’est l’égalité réelle, avec zéro sanction. Mais y parvenir risque de prendre du temps, car nous sommes encore très loin de l’égalité salariale.”
Tel est le constat formulé par Muriel Pénicaud, qui présentait lundi 21 octobre, au Medef, un point d’étape sur le déploiement de l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Les 1 400 entreprises de plus de 1 000 salariés avaient jusqu’au 1er mars, et celles employant entre 250 et 1 000 salariés avaient jusqu’au 1er septembre, pour publier leur score. Dans le détail, seules 167 ont obtenu le score de 99. En outre, près de 17 % sont en deçà de 75 sur 100. Elles risquent de devoir payer des pénalités en cas d’absence de mesures d’ici 3 ans. Pas question pour Muriel Pénicaud de dévoiler leur identité, mais les noms de celles qui ont plus de 1 000 salariés seront publiés d’ici mars 2020, quand les sociétés de 50 à 250 salariés devront publier leur note.
Un enjeu de compétitivité et de performances
Mais la ministre du Travail constate une “émulation” au sein des entreprises, qui seraient “poussées positivement” par l’index de l’égalité hommes femmes.
“Au-delà des injonctions, c’est un outil pratique qui aide les organisations à progresser. Même si elles n’atteignent pas 99 / 100 dans un an, l’essentiel est qu’elles augmentent leur score en mettant en œuvre un vrai plan d’action”, affirme-t-elle.
Les enjeux posés par l’index ne sont pas que sociétaux. “L’égalité salariale est un sujet important pour les entreprises pour des raisons de compétitivité et d’efficacité”, rappelle Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef.
Pour les organisations, ce dispositif “contribue à la marque employeur et à l’attractivité, en permettant de garder des talents et d’en recruter”, constate Marie-Christine Oghly, présidente de EnginSoft France et “ambassadrice” de l’index auprès des PME. Pour elle, “il est important de le présenter positivement, comme un outil permettant une meilleure croissance”.
Une tolérance pour les PME ?
Car pour les sociétés de 50 à 250 salariés, qui devront publier leur note d’ici mars 2020, l’index risque d’être compliqué à mettre en place.
“Pour nombre de PME, il est difficile de monopoliser suffisamment de personnel sur ce sujet, et re-traiter toutes les données des fiches de paie est extrêmement laborieux. D’autres restent un peu perdues. Il faudrait probablement simplifier encore cet outil”, constate ainsi Armelle Carminati, présidente du comité “Entreprise inclusive” du Medef, qui effectue un “tour de France” des organisations adhérentes au syndicat patronal.
Toutefois, Hubert Mongon, délégué général de l’Union des industries et des métiers de la métallurgie (l’UIMM), remarque que “les éditeurs de logiciels créeront progressivement des outils pour les petites entreprises, afin que cela ne soit plus, très bientôt, une contrainte”. Son organisation a de son côté développé une application spécifique pour les entreprises de la métallurgie (80 % de PME), qui analyse automatiquement les fiches de paie, “permettant ainsi de calculer l’index plus rapidement”.
De son côté, Geoffroy Roux de Bézieux propose de créer “une sorte de Cour d’appel, une chambre d’arbitrage”, qui tiendrait compte des difficultés financières des petites entreprises présentant de mauvais résultats en mars 2020. Une idée que Muriel Pénicaud n’a pour l’heure pas écarté.
La ministre du Travail a conclu son point d’étape en se focalisant sur les ‘freins invisibles’ à la promotion des femmes dans les structures hiérarchiques (Comex, conseils d’administration, instances dirigeantes). Alors que Marlène Schiappa, la secrétaire d’Etat chargée de l’égalité des sexes et de la lutte contre les discriminations, a annoncé fin août un projet de loi imminent “en faveur de l’émancipation économique des femmes” (1), Muriel Pénicaud indique “viser l’égalité salariale à travail égal d’ici 3 ans”.
Mais selon elle, “il faudra un vrai travail culturel et managérial” pour briser le plafond de verre. Ce à quoi participerait l’index, en “amenant une prise de conscience sur ce sujet”.
Mise à jour du 24 octobre 2019 :
La Direction générale du travail a réagi a cet article, en confirmant qu’il “sera plus difficile pour les PME de calculer leur index, car elles sont bien moins équipées en RH que les plus de 1000 salariés”, mais que le ministère a mis en place “tout un dispositif d’accompagnement pour les aider dans la mise en œuvre de ce système”.
Rendez-vous ainsi sur le site Travail-Emploi.gouv, sur lequel se trouve un question/réponses et un simulateur en ligne (qui sera fonctionnel le 5 novembre). La plateforme permet aussi de contacter des “référents égalité professionnelle”, qui ont pour mission de répondre aux interrogations en matière de calcul de l’index.
En direction des entreprises de plus de 50 salariés, le gouvernement charge en outre ses “ambassadeurs” de l’index d’organiser des réunions d’information avec les dirigeants, mais aussi des ateliers (prévus d’ici fin novembre). Enfin, une hotline devrait être disponible début 2020.
(1) Il devrait aborder des sujets aussi divers que le retour au travail après la maternité, l’accès au crédit pour les entrepreneuses, ou encore la place des femmes dans les directions d’entreprise.