Entreprise

La liberté au travail existe-t-elle ?

L’article N°4 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 stipule que “La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui”. Mais la liberté au travail existe-t-elle ? Par Olivier Bachelard, professeur à l’EM Lyon Business School *

 
Il ne s’agit pas ici de revenir sur la liberté du travail qui interdit les engagements à vie, le travail forcé, encadre les clauses de non concurrence ou garantit le droit de démissionner, mais bien de s’interroger sur la liberté au travail. Si l’on admet que le travail consiste à produire et obtenir un résultat, à accepter les contraintes et les efforts et à obtenir, en contrepartie, une reconnaissance et un respect du salarié dans sa dignité et sa santé (1), alors la question de la liberté s’exprime dans la confrontation entre les contraintes inévitables et la solidarité collective.

L’exemple de la mise en place d’un îlot flexible de caisse dans la grande distribution illustre concrètement la notion de liberté dans le cadre du travail. Dans ce cas, un groupe d’une quinzaine de caissiers élabore de façon autonome l’emploi du temps de l’équipe. Face aux contraintes organisationnelles, ces salariés disposent des mêmes conditions physiques de travail, des mêmes conditions de rémunérations qu’ailleurs. Mais ils jouissent en plus d’une liberté de gestion du temps bénéfique pour eux comme pour l’entreprise avec un taux d’absentéisme réduit et un engagement renforcé.

 

Solidarité

Ce groupe de salariés mobilise collectivement son intelligence et sa capacité de proposer des solutions. L’égalité, autre valeur républicaine, est incarnée car chacun est successivement responsable de l’îlot et tous ont les même droits et devoirs. La subjectivité de chacun, également reconnue, favorise les comportements solidaires. L’apport de la théorie des jeux nous montre depuis longtemps que le choix est affecté par la perception d’enjeux partagés avec d’autres. Cette liberté dans la possibilité des choix nous engage également sur le chemin de la responsabilité.

Certes, il existe d’autres cas plus marquants d’entreprises qui suppriment les contraintes organisationnelles pour favoriser la liberté d’action, de la start-up à l’entreprise libérée en passant par des PMI qui fonctionnent en production sans managers ni directeur. Pourtant, avec ce simple exemple émanant du quotidien opérationnel, nous constatons que la liberté, ne serait-ce que d’organiser son temps, ne fait pas seulement quelque chose pour nous. Elle fait également quelque chose de nous.

 

(1) La santé est à prendre au sens de la définition de l’Organisation Mondiale de la Santé du 22 juillet 1946.

* Qui est l’auteur ?

Olivier Bachelard est psychologue du travail et professeur de « Management, Droit et RH » à l’EM Lyon Business School. Egalement directeur du Campus Saint-Etienne EM Lyon, il a auparavant exercé une carrière d’enseignant-chercheur, puis de directeur de la formation continue de l’École Nationale Supérieure de la Sécurité Sociale (EN3S), et de directeur délégué de l’ESC Saint-Étienne. Ses recherches portent sur le management, la gestion des ressources humaines et la santé au travail.

 

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