Lamberto Maffei est neuro-biologiste. Son ouvrage Hâte-toi lentement, best-seller en Italie est paru en France chez Fyp éditions. Une ode à la lenteur qui traite notamment de la rapidité qui domine désormais dans les relations et les décisions sous l’action du numérique. Dans nos vies quotidiennes, mais aussi dans les entreprises.
Pourquoi avez-vous décidé d’écrire ce livre et quel message souhaitez-vous faire passer ?
Je suis neurophysiologiste. Je sais donc que le cerveau est une machine lente, particulièrement quand on le compare aux ordinateurs capables de travailler au minimum 1 million de fois plus rapidement. Voici un exemple. Quand vous êtes dans un train en marche, il est souvent impossible de lire le nom de toutes les stations simplement parce que notre système visuel nerveux est lent et ne suit pas la vitesse du train.
Pourquoi veut-on toujours courir plus vite pour arriver avant la fin ? Je ne vois aucune logique à mener une vie frénétique. Nous courrons le risque de perdre des valeurs comme la joie et l’enrichissement culturel, la conversation et la solidarité.
Une vie à mille à l’heure est, sans aucun doute, plus instinctive car elle ne nous laisse pas de temps pour réfléchir avant de décider. Le message que je souhaiterais faire passer ressemblerait à “laisser-nous être plus humains !”
Notre cerveau n’est pas adapté à la vitesse du monde. Quelles sont les principales conséquences en particulier au travail, dans les entreprises ?
Tout le monde veut parler, mais personne ne prend le temps d’écouter ni d’échanger des idées. La bataille entre la lenteur de notre cerveau et la rapidité des outils digitaux créent des situations de stress qui peuvent même atteindre des niveaux pathologiques. De plus, la vie frénétique peut, paradoxalement, générer de la solitude. Par exemple les jeunes seuls dans leur chambre sont capables de communiquer avec de nombreuses personnes partout dans le monde sans contact direct ni émotionnel. Ils sont bombardés de messages et je me demande toujours comment ils trouvent tout simplement le temps de réfléchir.
En somme il n’y a pas de temps pour les gens qui ne courent pas aussi vite que les autres, la société avance, sans pitié.
Les nouvelles technologies sont-elles directement responsables ? En somme, comment faire pour que notre cerveau soit utilisé de manière plus efficace ?
Évidemment, les nouvelles technologies sont très utiles et ont, par bien des égards, amélioré notre qualité de vie, mais elles doivent rester des outils et non des sortes de drogues dont nous sommes dépendants et sans lesquelles on ne peut pas travailler ni même penser. Les nouvelles technologies ne doivent pas devenir une partie de notre cerveau ni influencer notre comportement. Mon message est de revenir à la culture de l’échange, du langage et des sciences humaines et de prendre le temps de réfléchir, lentement, avant de prendre une décision. Il est essentiel de prendre en considération tous les éléments impliqués dans la situation.