Aristote disait que « la beauté (était) un appui préférable à toutes les lettres de recommandation ». D’après des recherches menées plus tard, dans les années 1970, par K. Dion, ce qui est « beau » serait aussi « bon ». Autrement dit, la beauté serait associée à des qualités relationnelles et intellectuelles positives. Une personne « belle » serait ainsi plus digne de confiance, ou plus persuasive auprès des clients. Ce stéréotype inconscient nous traverse l’esprit lorsque nous rencontrons un individu et peut altérer notre jugement. Plus une décision doit être prise rapidement, plus ce mécanisme automatique se met en place.
Conséquence ? 83 % des Français interrogés, dans le Baromètre 2024 réalisé par Apicil et OpinionWay, estiment que l’apparence physique reste un critère de discrimination dans la sphère professionnelle en 2024. « C’est un vrai sujet de société dans notre pays, encore minoré par les entreprises malheureusement », regrette Sofiene Chaabani, responsable RH, Inclusion, Emplois et Carrières, au sein du groupe Apicil.
Discrimination capillaire
« Nous progressons concernant les inégalités entre les femmes et les hommes, ainsi qu’autour des enjeux liés au handicap, mais nous passons à côté de nombreux autres critères de discrimination, comme l’apparence physique », précise-t-il. Celle-ci relève de critères physiques subis (couleur de cheveux, taille, forme du visage, etc.) et choisis (vêtements, tatouage, attitude, etc.). En cela, la beauté « reste encore trop souvent une variable clé dans les destinées professionnelles des salariés », indique-t-il.
À l’inverse, une apparence physique jugée désavantageuse va impacter négativement la carrière d’un individu. Cette année, la grossophobie et la discrimination à l’encontre des cheveux crépus/ondulés ont été particulièrement pointées du doigt. Cette texture de cheveux est, en effet, 2,5 fois plus susceptible d’être perçue comme étant moins professionnelle. C’est pourquoi, en mars 2024, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à intégrer la discrimination capillaire dans le Code du travail.
Valoriser les compétences
Il est vrai qu’en France, bon nombre d’entreprises valorisent le paraître, de surcroît avec l’avènement des réseaux sociaux et professionnels. Et cela commence dès la phase du recrutement avec la sélection de candidats dont le CV est assorti d’une photo (surtout pour les cadres). Ce qui n’est pas le cas dans les pays de culture anglo-saxonne, comme les États-Unis, le Canada, l’Australie ou la Grande-Bretagne.
C’est pourquoi, ce dernier appelle les entreprises à « communiquer » davantage autour de ce sujet « en formant en interne les recruteurs et les managers. La première étape, c’est de rétablir la connaissance, de conscientiser ce qui se joue lors de la fameuse « première impression » que nous avons de quelqu’un. Cela permet de se libérer de codes rigides, du conformisme plébiscité jusqu’à présent en entreprise. »
Ensuite, souligne le responsable dans le domaine RH, « c’est de leur apprendre la manière dont ils peuvent davantage valoriser le potentiel et les compétences d’un individu sans considération physique. » D’après lui, l’entreprise n’en sera que plus productive et créative. Une affirmation démontrée dans le rapport « Why Diversity matters even more » du cabinet McKinsey, publié en décembre 2023. On y apprend également que les entreprises inclusives ont 39 % de chances de réaliser des performances financières supérieures. « C’est une chance pour les organisations. Elles ont tout à y gagner », termine le responsable domaine RH.
Pour rappel, depuis 2001, la France a reconnu l’apparence physique comme un motif de discrimination puni par la loi. Cependant, ce critère de discrimination, lors des embauches ou des carrières, n’est pas un critère reconnu dans les conventions internationales (Organisation Internationale du Travail, Europe).
ce n’est pas une attitude authentique, dans l’ère du management de bienveillance