Management

« Le but est d’avoir une approche plus holistique du bien-être au travail »

Jessica Grossmeier, consultante spécialiste du bien-être au travail qui vit près de San Francisco, a publié, outre-Atlantique, un livre dont le titre peut se traduire par « Réinventer le bien-être au travail : favoriser une culture de la finalité, de la relation et de la transcendance ». Un ouvrage pratique rassemblant histoires vécues et statistiques, conseils et analyses dans une approche américaine de ces problématiques. Laquelle peut s’avérer inspirante pour les collaborateurs, managers et responsables des ressources humaines en France, dans leur quête de sens et de bien-être en milieu professionnel. Une manière d’apporter un supplément d’âme au travail… et d’aligner vision, solutions et résultats.

 

Pourquoi avez-vous souhaité écrire ce livre ?

Jessica_Grossmeier

 

Je l’ai d’abord fait pour moi, car j’ai vécu un burn-out il y a dix ans puis j’ai éprouvé une baisse d’intérêt pour mon travail et mon accomplissement professionnel. La pandémie n’a pas été un facteur déclenchant direct de cette prise de conscience pour moi. En revanche, comme elle a engendré de nombreux burn-out et départs volontaires, avec le phénomène de la grande démission aux Etats-Unis, je me suis dit qu’il était temps de rédiger cet ouvrage, après en avoir eu l’idée depuis des années.

L’an dernier, j’ai donc pris une année sabbatique afin, dans un premier temps, de me documenter sur la spiritualité en milieu professionnel, dans le but d’avoir une approche plus holistique du bien-être au travail.

 

 

 

En quoi consiste le bien-être au travail d’un point de vue holistique ?

Il s’agit de se soucier du collaborateur dans son ensemble, en se basant sur une approche spirituelle qui va au-delà de la religion et adresse le bien-être mental. Même si les entreprises sont souvent réticentes à cela, je montre, à partir d’exemples concrets et d’études en sciences du management, que cela améliore la qualité de vie au travail, quelle que soit la taille de l’entreprise, le profil ou la fonction des collaborateurs, cols blancs ou cols bleus.

Sachant que la spiritualité repose alors sur trois clés. D’abord la signification que nous donnons à notre vie professionnelle et personnelle, la raison d’être. Ensuite, le sens de la relation avec les autres et sa qualité. Enfin, la conscience qu’il existe quelque chose de plus grand que nous, que nous faisons partie d’un tout qui nous dépasse, que nous ne connaissons pas vraiment.

 

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Quelles peuvent être les traductions concrètes de cette démarche en entreprise ?

Je peux citer l’exemple de Patagonia dont le but est de sauver la planète. [NDLR : la nouvelle raison d’être de la marque américaine de vêtements techniques outdoor est « We’re in business to save our home planet« ] Grâce à cela, chaque jour, les employés peuvent donner du sens à leur travail et se connecter à quelle chose qui leur est supérieur, au-delà de leur intérêt personnel.

Pour certaines sociétés, cela peut passer par l’instauration de programmes de pleine conscience et de méditation qui permettent de trouver une transcendance, d’élever la connaissance et la perception de soi, du monde et des autres. Ou bien par des séances de yoga. Autres solutions : le contact avec la nature ou le sport collectif entre collègues et les moments de convivialité, fussent-ils en distanciel.

 

Quelle importance accordez-vous aux relations interpersonnelles ?

L’appartenance à un groupe est capitale, au travail comme en dehors : faire partie d’une famille, d’un quartier, d’une communauté, etc.

Il est essentiel de se connecter au travail sur un plan non seulement professionnel mais aussi personnel. Il faut apporter davantage de soi-même au bureau, tisser des liens avec ses collègues, y compris sur le plan personnel. Par exemple, lors d’une visio-conférence, on peut réagir en voyant apparaître le chien du collaborateur à l’écran. Il faut faire preuve d’initiative et de créativité pour se connecter et prendre soin les uns des autres. Et commencer par demander « comment ça va ? » vraiment avant le début d’une réunion, en présentiel ou distanciel. Le bien-être au travail, c’est l’affaire de tous. On ne peut pas externaliser la démarche, le changement de culture doit être pris en main en interne, avec différents leviers : ressources humaines, leadership, diversité, équité et inclusion, santé au travail, etc. Et ce n’est pas une question de budget… De plus, au-delà des moyens et des mesures prises pour évaluer la politique de bien-être, il est indispensable que les collaborateurs en aient une juste perception en se sentant considérés, écoutés et valorisés. Cela passe, notamment par des sondages réguliers auprès des équipes.

 

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Pensez-vous que la pandémie et ses conséquences auront un effet accélérateur sur la mise en œuvre du bien-être au travail ?

Je crois que cela va prendre du temps, pour que ce soit vraiment porté par les entreprises. Il y a déjà eu des progrès car, dans les années 1980, on jugeait impossible, par exemple, d’intégrer des programmes de pleine conscience sur le lieu de travail. Or aujourd’hui, on voit se mettre en place de plus en plus de salles de repos, de retraite méditative. On pourrait imaginer utiliser des casques de réalité virtuelle pour s’immerger dans le calme et la nature, même si le bureau se trouve dans un environnement urbain. C’est indispensable de proposer un espace au calme, à part, sans téléphone portable, dédié à la réflexion, à la décompression. Cela permet ensuite d’améliorer performances et concentration. D’une manière générale, il faut apporter de l’attention à la lumière dans les locaux, à la présence de plantes, de couleurs, d’espaces extérieurs pour pouvoir prendre l’air quand on est au bureau. Sans oublier de raccourcir la durée des réunions pour laisser un temps de pause entre deux.

 

Plus d’informations sur le site de Jessica Grossmeier.

 

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