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“Le coronavirus met à mal le taylorisme”

Télétravail, culture du présentiel, émergence de personnalités fortes, la crise sanitaire va rebattre les cartes au sein des entreprises. Nous avons demandé à François Dupuy, sociologue des organisations, de nous livrer son analyse.

Quelles conséquences aura cette situation exceptionnelle en matière d’organisation du travail ?

J’ai la certitude que les entreprises pourront avoir une vraie connaissance de la qualité du travail à distance. C’est une sorte de test en grandeur nature. D’autant que les organisations professionnelles peuvent désormais expérimenter le télétravail sur des catégories d’actifs jusque-là moins concernés par cette forme nouvelle de travail. Le management va nécessairement devoir réfléchir sur ce qu’il croit savoir de la culture du présentiel dans l’entreprise. Les cartes vont être rebattues. Car, quoi qu’on en dise, cette fameuse culture du présentiel, est toujours très ancrée dans le monde de l’entreprise. Des réflexions sur ces nouveaux modes d’organisation vont se mettre en place. C’est certain!

 

Le management va-t-il devoir penser le télétravail différemment ?

C’est évident. On ne contrôle pas le travail de la même manière s’il est exécuté dans l’entreprise ou chez le salarié. Ce sont des caractéristiques radicalement différentes qui vont impliquer de revoir les notions de confiance. Adieu donc le ‘command and control’ ! Le management va nécessairement devoir se remettre en question pour mettre en place plus d’échanges basés justement sur la confiance. Il va falloir inventer de nouvelles formes managériales. Si la crise sanitaire n’avait pas été si grave, je vous aurais dit que c’est une période très intéressante.
 

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Qu’est-ce que ce genre de situation exceptionnelle peut voir émerger au sein des entreprises ?

Chaque fois qu’une entreprise connait une situation de crise, cela permet à des personnalités anonymes de se révéler. Des salariés, étouffés par une routine bureaucratique, peuvent émerger soudainement. Ils se démarquent alors par leur esprit collectif, leur capacité à rebondir et à être force de proposition. J’ai connu cela en tant que consultant lors de la crise qui a secoué la compagnie Air France à la fin des années 90. Avec Christian Blanc, le PDG de l’époque, nous avons ainsi vu naître des personnalités remarquables jusque-là un peu falotes.

 

Vous semblez assez confiant ?

Cette situation met à mal le taylorisme. Cette épidémie vaut mille livres dénonçant les dangers de ce modèle économique encore ultra-dominant dans les sociétés. Je suis convaincu qu’à quelque chose malheur est bon. Nous allons impérativement devoir créer de nouvelles pratiques managériales.

 

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