Il existe pléthore de techniques de recrutement et de méthodes de management. Alexandre Pachulski, co-fondateur de Talentsoft et auteur du livre Start-up story : Le Guide pop culture de l’entrepreneuriat* vous propose d’imaginer la vôtre. Pour trouver la recette qui vous ressemblera, voici les ingrédients clés. À mixer à votre guise !
Votre livre fourmille de références culturelles, qu’il s’agisse de cinéma ou de musique. Ce choix reflète-t-il vos sources d’inspiration au quotidien ?
Exactement ! J’ai joué de la musique, et je m’y intéresse toujours. J’adore le cinéma. Ces univers sont fondamentaux pour moi, ce sont des sources d’inspiration infinies. En tant qu’autodidacte, j’avais envie que ce guide me corresponde, qu’il ne soit pas académique. J’avais aussi à cœur d’écrire un livre qui ne soit ennuyant ni à écrire ni à lire !
Lors d’un recrutement, vous déconseillez de se concentrer sur le CV. Pourquoi ?
Un CV est une photographie (plus ou moins honnête) à un instant T d’un parcours. En entretien, cela n’a aucun intérêt d’entendre le candidat déclamer toutes ses qualités, et encore moins de l’écouter réciter toutes ses expériences. Demandez-lui plutôt de vous raconter son histoire. Qu’est-ce qui lui a plu dans telle expérience ? Qu’a-t-il réalisé sur tel projet ? Quelles difficultés a-t-il rencontrées ? Une ou deux anecdotes vous permettront de cerner ses différentes qualités. Le recrutement nécessite plus que jamais que l’on s’intéresse aux personnes plutôt qu’aux CV. Lors d’un processus de recrutement, j’ai toujours à cœur de découvrir qui est vraiment le candidat. Cela demande de lui donner les moyens d’être eux-mêmes et d’exprimer ses aspirations réelles : qu’est-ce qui le rend heureux ou l’épanouit au travail ?
Par ailleurs, le CV peut être excellent, mais le courant ne pas passer en entretien avec le candidat. Il vous faut « sentir » la personne et vous demander si vous avez envie de travailler avec elle au quotidien. L’envie reste le moteur essentiel de toute collaboration. Lorsque j’ai recruté ma première assistante, il m’a fallu très peu de temps pour savoir que ce serait elle : l’énergie qu’elle dégageait, l’affinité naturelle ressentie… L’avenir a montré que je ne m’étais pas trompé.
Afin que la collaboration se passe ensuite pour le mieux, vous insistez beaucoup sur la culture du feedback. En quoi est-ce si important pour bien manager ?
Je ne crois pas au talent comme valeur intrinsèque. Des gens ont du talent, voire des talents, mais ce n’est pas quelque chose dont on peut disposer à volonté, quelles que soient les conditions environnantes. Le talent est une dynamique qui nécessite certaines conditions pour s’exprimer. Nous avons tous vu des salariés brillants s’éteindre dans tel contexte, et d’autres – jusque-là passés inaperçus – se révéler au sein d’une nouvelle équipe. Pour développer une organisation apprenante, c’est-à-dire capable de s’améliorer au fil de ses expériences, il convient d’instaurer une véritable culture du feedback. Une culture où non seulement chacun accepte les feedbacks, mais devient même demandeur. Il faut pour cela que plusieurs conditions soient réunies : de la bienveillance, des explications claires et précises pour que le feedback soit compréhensible et utile… Il ne s’agit en aucun cas de jugements, mais d’un retour sur la relation de travail plutôt que sur la personne en elle-même. Les feedbacks permettent de réaliser des ajustements tout au long de l’année, et pas seulement lors des entretiens formels. Ils contribuent à une collaboration épanouissante au quotidien (exactement comme dans un couple !) et à l’éclosion de talents.
« Un bon manager est un révélateur de talents »
Il n’y a pas, selon vous, un seul type de talent, mais une pluralité…
Tout à fait. On se réfère trop souvent dans les écoles ou en entreprises à la notion de talent en pointant les mêmes types de personnes : celles qui délivrent un haut niveau de performance. Pour autant, l’accroissement de la valeur économique et financière ne se fait pas sans une multitude d’autres types de personnes talentueuses ne se trouvant que trop rarement sous les projecteurs. Je pense, par exemple, dans notre monde incertain aux talents dits « adaptables ». Ils sont extrêmement précieux ! Ce ne sont pas forcément les meilleurs, mais ils sont capables d’exprimer leurs talents dans toutes les situations, ou presque. Ils ne se sentent pas déstabilisés face au changement, au contraire ils savent parfaitement s’y adapter.
Autre type de talent : les individus innovants. Ils font bouger les lignes et proposent des solutions auxquelles personne n’avait encore pensé auparavant. Ces différents types de talents (et il y en d’autres) ne sont pas faciles à repérer lors d’un recrutement. Rien de mieux que de demander aux candidats de vous raconter des histoires concrètes, des situations vécues, pour vous rendre compte de leur valeur dans une équipe.
Qu’est-ce qu’un bon manager aujourd’hui pour vous ?
C’est quelqu’un qui sait faire ressortir le meilleur de chacun. Il sait s’appuyer sur les autres et les aide à donner le meilleur d’eux-mêmes. C’est un révélateur de talents. Cela demande de savoir identifier les talents des membres de son équipe, au-delà des fiches de poste, et de les motiver à s’en servir au quotidien en créant des conditions favorables. Un bon manager a pour passion de faire briller les autres. Pour cela, il faut réussir à manager en étant soi-même, avec son propre style. Personnellement, si on m’avait demandé de venir aux réunions en costume et de me tenir bien calme devant mon ordinateur, cela n’aurait jamais fonctionné ! Je me sens bien quand je me sens libre. Cela me permet de transmettre mon énergie et d’apporter ma contribution.
Enfin, l’une des erreurs les plus fréquentes est de penser que les autres raisonnent comme nous et ont les mêmes attentes. N’imaginez pas ce que les gens attendent, demandez-leur ! Le plus important est de bâtir une relation personnalisée avec chaque collaborateur. Cela demande au manager de savoir faire preuve d’empathie et d’être réellement intéressé par les autres dans une volonté de les satisfaire. La clé ? Ecouter ! Poser des questions. S’intéresser. Autant de manières d’apprendre à mieux connaître les personnes avec qui vous travaillez.
* Editions Diateino.
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