Tribune – Nous changeons de temps. De manière très affirmée autant que lisible, le Président de la République a donné un nouveau ton au management et son style semble correspondre aux attentes des citoyens. S’il est “en marche”, il faut reconnaître qu’il avance et que, malgré les résistances, ses méthodes de management fonctionnent. Par Jean-Louis Raynaud, directeur des programmes de formation pour dirigeants Edhec business school.
Ce nouveau style peut-il – doit-il – s’appliquer dans les entreprises ? Plus précisément, ce changement de temps est-il assez profond, assez accepté pour que les managers s’en inspirent pour répondre aux attentes du corps social ?
Le style nouveau d’Emmanuel Macron repose en réalité sur des actions managériales déjà pratiquées : la concertation, la négociation, la délégation, et le travail d’équipe. L’innovation n’est donc pas dans la méthode, mais bien plus certainement dans un leadership fort et volontaire qui se traduit sous différents aspects.
D’abord, le président Macron a une vision précise de la société Française et de ses nécessaires évolutions. À l’échelle de l’entreprise, cette vision devient une impérieuse nécessité : les collaborateurs doivent savoir le pourquoi, le vers quoi. Mais les entreprises manquent souvent de précision, voire d’incarnation dans l’expression de leur vision : elles parlent trop souvent d’être les meilleures, avec les meilleures satisfactions clients et les meilleurs produits de leurs core business. Ce n’est plus suffisant ; il faut détailler les pourquoi, les comment, et les ruptures à anticiper.
L’agilité exige du pragmatisme
Ensuite, le Président a la volonté et le courage d’annoncer et de faire. Là encore, le management est attendu par le corps social. Il faut une constance dans l’action. Celle-ci rassure et donne des repères sur la progression. L’agilité n’est pas dans la construction de stratégie de communication élaborée, souvent floue ou volontairement incomplète, mais dans la capacité à être pragmatique et à savoir changer, modifier, adapter tout en restant dans la vision.
Un leadership fort et volontaire n’est pas incompatible avec l’agilité, au contraire. On attend aujourd’hui des managers une explication claire et une capacité à savoir dire, au nom du pragmatisme, que les décisions d’hier ne sont plus adaptées, sans se noyer dans un cortège de justifications.
Enfin, Emmanuel Macron a opté pour une forme de la communication qui se caractérise par la perception d’un discours de vérité avec des mots simples, et par un comportement de proximité, tout en sachant conserver une distance médiatique. Il y a là une agilité à mixer les codes de communication pour être accessible et distant dans le même temps. Ce charisme agile rassemble tous les publics, et répond aussi à l’attente des collaborateurs à l’égard du management.
Le collaborateur, un citoyen comme les autres
Nous ne sommes pas là pour juger ni de la valeur ni de la réussite de la politique du Président de la République. Mais nous percevons tous que les citoyens changent, donc que les collaborateurs changent. Une nouvelle expression du leadership s’installe, bien visible dans les médias, faite de discours clairs, fondée sur le pragmatisme, et accompagnée d’une communication qui annonce de manière lisible les changements, leurs cadences, et leurs logiques. Impossible de nier cette réalité.
Les managers ne font pas de politique, mais ils font du business avec le même citoyen, qui est aussi consommateur, collaborateur, ou représentant social. Nous changeons de temps. Les jeunes de la génération Y nous en avaient donné les premiers signaux, la nouvelle politique Française nous en apporte un autre. Le management ne peut les nier : il doit prendre en compte ces nouveaux facteurs, avec agilité et détermination.