Si les zélateurs des motorisations électrifiées ont longtemps espéré que les flottes s’y convertissent, le mouvement a été plutôt lent à s’enclencher. Ces derniers mois, l’élargissement de l’offre et le scandale du Diesel ont cependant renversé la tendance.
Décidément, le scandale du Diesel n’en finit pas de transformer le petit monde automobile. Après avoir encouragé les particuliers à passer à l’essence, voici qu’il est en passe de changer durablement la physionomie du parc roulant des entreprises. Certes, en 2017, ce carburant si décrié est bien resté le premier et de loin avec près de trois quarts des ventes. Mais sa domination s’érode de plus en plus rapidement au profit de l’essence bien sûr mais aussi des hybrides et électriques, qui constituaient à eux deux plus de 5 % des ventes aux flottes cette année. Bien sûr, le chiffre peut paraître modeste, mais il prend une tout autre ampleur lorsque l’on considère la progression des immatriculations, de 36,51 % pour les hybrides et de 48,26 % pour les électriques !
Les malheurs du Diesel ne sont bien sûr pas seuls en cause dans ce phénomène. Mais ils ont déclenché une prise de conscience dans les entreprises. Marc Laurent, directeur Pricing et Valeurs Techniques chez le loueur ALD Automotive, précise : “Nos clients se posent de plus en plus la question. Auparavant, le choix se portait presque exclusivement sur le Diesel sans réelle réflexion. Aujourd’hui pour les faibles kilométrages, l’essence revient en force mais aussi les motorisations électrifiées. Chez nous, les commandes d’hybrides ont été multipliées par trois en un an, et celles de véhicules électriques ont augmenté de 60 %”. Un mouvement que les loueurs longue durée encouragent. “Pour mieux conseiller nos clients, nous avons mis en place un site Internet qui leur permet de choisir le bon type de motorisation en fonction de leur usage et leur kilométrage”, poursuit Marc Laurent.
Des modèles plus performants
On s’en doute, les annonces concernant l’interdiction du Diesel dans certaines villes, voire du moteur thermique, pèsent dans la balance. “Pour l’instant, nous ne connaissons pas d’exemple de flottes qui ont basculé à l’hybride ou l’électrique pour cette raison uniquement. Mais les entreprises qui opèrent spécifiquement en milieu urbain s’y intéressent particulièrement, y compris sur les utilitaires. C’est le cas des spécialistes de la livraison du dernier kilomètre”, précise Damien Chalon, rédacteur en chef adjoint d’Automobile et l’Entreprise. L’augmentation des commandes de véhicules électrifiés est d’abord liée à une offre plus large. C’est particulièrement vrai en ce qui concerne les véhicules électriques, dont certains modèles proposent désormais des autonomies supérieures à 250 km réels, contre moins de 100 km voici cinq ans. Marc Laurent explique :
“L’autonomie restreinte des premiers modèles posait des problèmes à nos clients. Aujourd’hui, avec les nouveautés récentes, ils peuvent envisager des usages beaucoup moins contraints”.
En France, une voiture domine de la tête et des épaules le marché des électriques : la Renault Zoé, dont les ventes ont connu une forte progression depuis l’apparition de la version 400 à autonomie renforcée. “Les autres modèles du marché ont un peu plus de mal, mais cela pourrait bien changer avec l’apparition cette année de nouveautés importantes à commencer par la deuxième génération de Nissan Leaf, la voiture électrique la plus vendue du monde”, ajoute Damien Chalon. Elle n’est pas la seule : devant l’obligation imposée par l’Europe de diminuer leurs émissions, les constructeurs phosphorent. On attend ainsi en 2018 l’Opel Ampera E et la Tesla Model 3, et l’année prochaine de nombreux modèles français et allemands.
Non concernés par les problématiques d’autonomie, les modèles hybrides sont bien sûr plus populaires que les électriques en entreprise. D’autant qu’ils deviennent réellement compétitifs en matière de coût d’utilisation par rapport aux Diesel, en tout cas pour les kilométrages annuels inférieurs à 20 000 km. “Les TCO (Total Cost of Ownership) des Diesel et des hybrides essence ont une évolution contraire. La valeur résiduelle des premiers commence à diminuer quand celle des deuxièmes augmente. De plus la fiscalité leur est de plus en plus favorable notamment grâce à la récupération de TVA désormais autorisée sur ce carburant. Enfin, les loueurs encouragent leurs clients à choisir ces motorisations, car la revente des modèles Diesel à la fin de leur période de location est moins facile”, observe Damien Chalon. Pour les entreprises, la fiscalité des hybrides reste en effet avantageuse, même si elle a été durcie pour 2018 (lire notre magazine de février-mars). Là encore, c’est un constructeur qui tire son épingle du jeu sur notre marché : Toyota, dont la Yaris hybride est de loin la plus populaire auprès des flottes. Pour l’instant, ce sont les non rechargeables qui raflent la mise, pour des raisons évidentes de coûts, les modèles rechargeables étant plutôt l’apanage des voitures de direction. On le voit, les flottes prennent peu à peu le tournant de l’électrification. Pour autant, il ne faut pas imaginer un grand remplacement des modèles thermiques à court terme : avec un kilométrage moyen annuel de 30 000 km par véhicule, elle ne pourront pas se passer de gazole avant longtemps. La première alternative reste encore pour elles l’essence, qui constituait 20 % des ventes en 2017.