Depuis le 1er septembre 2022, les entreprises de plus de 50 salariés doivent se conformer à des règles supplémentaires concernant l’égalité professionnelle entre femmes et hommes. Explications de deux avocates du cabinet Eversheds Sutherland.
La loi Rixain du 24 décembre 2021 vient compléter celle du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel qui a instauré l’index de l’égalité homme-femme. Ce dispositif incitatif fixe un cadre contraignant pour mesurer et faire progresser la parité au travail. Initialement, il était destiné aux entreprises de plus de 1 000 collaborateurs, puis, en 2019, à celles de plus de 250 employés. « Depuis 2020, toutes les sociétés d’au moins 50 salariés depuis plus de trois ans consécutifs sont concernées, précise Pauline Sauvadet, avocate au sein du département droit social et RH du cabinet international Eversheds Sutherland. L’objectif est la prise de conscience et l’évolution des pratiques au travail. »
Le calcul de l’index de l’égalité professionnelle
L’index de l’égalité professionnelle est constitué d’une note globale sur 100 points, calculée à partir de 5 indicateurs :
– l’écart de rémunération entre hommes et femmes, qui compte pour 40 points maximum ;
– l’écart de répartition des augmentations annuelles individuelles (sur 20 points) ;
– l’écart de répartition des promotions salariales, uniquement dans les entreprises de plus de 250 salariés (15 points) ;
– le nombre d’employées augmentées à leur retour de congé de maternité (15 points) ;
– la parité parmi les dix plus hautes rémunérations de l’entreprise (10 points).
Si certaines sociétés ne peuvent pas calculer tous ces indicateurs, c’est la règle de proportionnalité qui est effectuée pour obtenir le score final sur 100. Ce dernier doit être publié, au plus tard, le 1er mars de chaque année. « Il s’agit de le faire figurer sur le site Internet de l’entreprise de manière lisible et visible, poursuit Pauline Sauvadet. Mais aussi de le communiquer sur l’intranet et au comité social et économique ainsi qu’à l’inspection du travail. Quand il n’existe pas de site Internet ni d’intranet, on a alors recours à l’affichage dans les locaux de l’entreprise. Dans tous les cas, outre le score, il faut préciser de manière claire et transparente la méthode de calcul et autres éléments d’explicatifs. »
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Depuis cette année, une nouvelle obligation a été instaurée, en plus de la parution des résultats de l’index : avant le 1er septembre de chaque année, les sociétés affichant un score inférieur à 85 points doivent fixer et publier des objectifs de progression pour les critères où le maximum de points n’a pas été atteint. Quant à celles affichant un total inférieur à 75 points, elles sont tenues de prendre et publier les mesures correctives visant à améliorer la parité.
« La publication doit se faire au même endroit que l’index, notamment sur le site web, souligne Pauline Sauvadet. Par ailleurs, le plan d’action, s’il n’y a pas eu d’accord collectif, doit définir, après consultation du comité social et économique, des mesures de correction suffisamment efficaces avec des critères clairs, précis et opérationnels. Par exemple, l’octroi d’augmentations individuelles. »
Les sanctions encourues
Quelles sont les sanctions encourues en cas de non-respect de toutes ces obligations ?
Tout d’abord, si le score de l’index n’est pas publié avant le 1er mars chaque année, il s’agit d’une pénalité pouvant atteindre 1 % de la masse salariale.
Ensuite, les entreprises ayant obtenu une note inférieure à 75 points sont dans l’obligation de prendre des mesures correctives dans les trois ans afin de réduire l’écart professionnel entre hommes et femmes. Passé cette période, une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1 % de la masse salariale annuelle peut être infligée.
Pour compléter l’amélioration de l’égalité salariale, la loi Rixain du 24 décembre 2021 entend, de son côté, influer sur une meilleure parité dans la progression de carrière et la représentation au sein des directions.
Les entreprises connaissant des écarts de représentation hommes-femmes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes avaient jusqu’au 1er septembre pour publier ces différences. Ce sera ensuite à faire avant le 1er mars de chaque année.
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De plus, à compter du 1er mars 2026, il faudra atteindre au moins 30 % de femmes et d’hommes cadres dirigeants et au moins 30 % de femmes et d’hommes membres d’instances dirigeantes. Des proportions qui passeront à 40 % à partir du 1er mars 2029.
« Dans le cas où ces objectifs ne seront pas atteints, l’entreprise concernée disposera d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité, indique Déborah Attali, avocate associée en charge du département droit social au sein du cabinet Eversheds Sutherland. Tout cela va prendre beaucoup de temps et la France est bien loin de l’égalité salariale entre hommes et femmes, même si elle n’est pas si mal située au niveau européen. Cependant, l’index a le mérite de permettre aux femmes, mais aussi à une nouvelle génération d’hommes, de regarder ces critères avant de choisir une entreprise. Les mentalités devraient évoluer dans les années à venir. » Pour l’instant, seulement 2 % des entreprises ont atteint la note maximale de 100 et, en début d’année, l’Insee pointait un écart de plus de 22 % entre les rémunérations des femmes et celles des hommes. En mars 2022, le score moyen de l’index était de 86 et 92 % des entreprises avaient obtenu une note supérieure ou égale à 75 points.
Depuis 2019 et la mise en application de la loi dite « avenir professionnel », 32 pénalités financières ont été prononcées.