Tribune – Page Facebook, compte Twitter, profile LinkedIn, comptes Instagram ou We Chat… Autant de media qui permettent aux entreprises B2C, B2B ou B2B2C de communiquer avec leurs clients ou consommateurs directs et indirects. Un media reste néanmoins un support de communication, et ne peut être confondu avec une stratégie de communication, et encore moins avec une stratégie digitale. Pourtant, combien de PME ou de multinationales prétendent avoir intégré le ‘digital’ dans leur plan stratégique alors même que cela se résume à quelques posts ou messages sur les réseaux et medias sociaux ? Par Anne-Flore Maman Larraufie, Ph.D., Academic Director MS SMIB – Essec.
Aujourd’hui, la nécessité d’être digitalisé n’est plus discutée, tant le monde économique a évolué vers un besoin de rapidité, de transparence et de gestion dématérialisée des activités. Néanmoins avoir une stratégie digitale c’est développer une vision de son entreprise en y intégrant les composantes numériques, du blog d’entreprise au magasin conçu en réalité virtuelle permettant une immersion complète de l’utilisateur dans l’univers de la marque. Mais qui dit vision dit anticipation, disruption, essais (avec succès ou non). Or peu d’entreprises ont une vraie réflexion intégrée (i.e. impliquant toutes les divisions) autour du digital, et encore moins dans ses impacts humains (RH) ou consommateurs (expérience d’achat, biais cognitif autour du prix, anxiété liée au choix, etc.). Les directions stratégiques tentant d’étayer cette réflexion prennent le digital comme le Sesam qui leur ouvrira les portes de la connaissance et donc de l’aide à la décision et parlent de ‘Big Data’, en oubliant malheureusement que ‘big’ est rarement synonyme de ‘good’. Pour que les données collectées soient utilisables d’une façon efficiente, elles doivent être collectées d’une façon réfléchie stratégiquement avec donc une vision, une anticipation.
Fin ou moyen ?
Ainsi ne nous y trompons pas, c’est bien la vision stratégique qui compte et le digital n’en est que le support de déclinaison, comme il y eut le papyrus chez les Égyptiens ou le Minitel au 20e siècle. Aucune vision ne peut être déshumanisée, car le propre d’une vision c’est d’être imprévisible, parfois irrationnelle, et certainement pas anticipable. Il y a peu à parier que l’Intelligence Artificielle remplacera les visionnaires…
Alors comment faire dans un monde toujours plus pressant en matière de digital ? Tout d’abord il faut commencer par poser les jalons de la stratégie digitale en se posant une question simple : pourquoi ? Il faut ensuite décliner les moyens opérationnels de déployer cette stratégie en faisant tomber les barrières entre les services (certains parlent ainsi d’expérience omnicanal en retail, vs. cross-canal). Enfin, il faut mesurer les impacts humains et matériels que ce déploiement engendrera ou pourrait engendrer et prévoir des moyens de juguler les impacts négatifs et de capitaliser sur ceux positifs. Force est de constater que le cadre d’aujourd’hui est assez peu préparé à cela, et malheureusement ce n’est pas en suivant des formations compartimentées sur les réseaux sociaux, le big data, le e-WoM qu’il sera prêt à affronter un revirement complet dans la façon de concevoir le monde des affaires dans 30 ans… Avoir une vision holistique suppose des qualités qui ne peuvent s’acquérir que de manière holistique, parfois en relisant de bons vieux classiques afin de se poser la bonne question : le digital dans mon entreprise, une fin ou un moyen ? Machiavel n’est pas loin : bonne (re)lecture !