Près de 6 managers sur 10 se sentent démunis après une promotion « par accident », selon la dernière étude du cabinet Robert Walters. Si cette situation peut paraître cocasse, « c’est plus fréquent qu’on ne le pense et cela concerne tous les secteurs », assure Éric Dejean-Servières, directeur général de Préventica, plateforme et salon spécialisés dans la santé, la sécurité et la qualité de vie au travail (QVT). « Cela arrive lorsqu’une entreprise peine à remplacer, ou doit remplacer dans l’urgence, un manager sur le départ. L’un de ses collaborateurs, souvent le plus compétent de l’équipe, prend sa place et se retrouve soudainement à devoir gérer des responsabilités et une équipe. Or, il ne sait pas forcément manager. Souvent, le temporaire devient définitif. »
Cette arrivée soudaine à la tête d’un projet ou d’une équipe peut se dérouler dans de bonnes conditions, ou pas ! « Nous ne pouvons jamais savoir à l’avance si le nouveau manager va être à l’aise avec ses nouvelles fonctions. Mais, dans tous les cas, ce n’est pas optimal, car une prise de poste se prépare. » L’impréparation peut conduire à la frustration (voire au mal-être) du néo-manager. Conséquence ? « Le manager en souffrance prend de mauvaises décisions, ne communique pas bien auprès de ses équipes. Les relations humaines se compliquent au quotidien. L’environnement de travail devient toxique. »
En cela, c’est l’ensemble de l’équipe qui se retrouve entraîner dans son sillage négatif : « Ses collaborateurs sont dans l’incompréhension, en raison de directives contradictoires, voire ressentent une grande frustration. Ils émettent des résistances et des critiques à l’égard du manager. Ils ne sont plus en mesure d’appliquer correctement les consignes. En cascade, les résultats ne seront pas conformes aux attentes de l’entreprise, ce qui entraînera une baisse de productivité. La santé mentale de tout le monde en sera affectée », dit-il.
Reconnaissance et formation
Afin d’éviter que le manager soit à l’origine de problèmes qui n’existaient pas avant, ou, a minima, qu’il n’aggrave pas les problèmes existants : des solutions existent. D’après le dirigeant de Préventica, le responsable du manager peut faire l’annonce de sa nomination de vive voix ou par mail afin d’officialiser sa prise de poste auprès des équipes, et ainsi « lui donner un forme de légitimité hiérarchique », indique Éric Dejean-Servières. Il peut se tourner vers les services RH pour faire modifier son statut, augmenter son salaire, et lui proposer des formations. « Cela contribuera à accroître fortement sa motivation », ajoute-t-il.
De son côté, le manager « par accident » peut instaurer un nouveau cadre de travail avec ses équipes dans le but de « repartir de zéro », poursuit-il. Pour ce faire, il lui suffit de mettre tout le monde autour de la table afin de se présenter plus personnellement, communiquer sur la situation, répondre à leurs interrogations, les sonder sur leurs envies professionnelles, fixer des objectifs. En d’autres termes ? Trouver un consensus autour de l’organisation de travail. « L’idée est de tout co-construire pour avancer ensemble », résume-t-il.
Enfin, pour que ce nouveau départ soit une réussite, la condition sine qua non est de mettre en place des relations bienveillantes et de confiance mutuelle : « Le manager a tout à gagner à être bienveillant avec ses équipes, et les équipes, bienveillantes avec leur nouveau manager. Ils doivent s’écouter et s’entraider pour continuer à performer dans un contexte momentanément déstabilisé et déstabilisant », termine le DG.