Moins d’un mois avant le déploiement du prélèvement à la source, les interrogations sont encore nombreuses. Notamment pour les cas particuliers, comme les expatriés ou les personnes ayant plusieurs employeurs. Le point avec Bertrand Damon, consultant expert au sein de mc2i Groupe, cabinet de conseil spécialisé dans la transition numérique.
Le prélèvement à la source entre en vigueur le 1er janvier prochain et, normalement, tous les salariés sont sensibilisés à cette nouvelle façon de prélever l’impôt. Mais comment cela va-t-il se passer pour les salariés expatriés ?
Si le salarié est employé par le biais d’un contrat local, la question ne se posera pas : le prélèvement à la source ne s’applique pas ou est suspendu. En revanche, s’il est toujours employé par l’entreprise française, ce qu’il faut déterminer c’est la résidence fiscale du salarié. Ce qui est loin d’être simple à connaître pour l’employeur, contrairement à ce que l’on pense. Dans les faits, s’il est domicilié fiscalement en France, alors le prélèvement à la source s’appliquera normalement. Dans le cas contraire, ce sera aux salariés de régulariser sa situation auprès du fisc.
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Aujourd’hui, rien ne semble être clairement défini concernant les expatriés ?
Tout à fait. C’est un peu du cas par cas. À titre d’exemple, si un salarié est envoyé au Royaume-Uni pendant deux ans, clairement, l’entreprise va arrêter le prélèvement à la source. C’est en tous cas ce qu’ont décidé l’ensemble de nos clients, qui partent du principe que c’est aux salariés de bien déclarer leur résidence fiscale et de régulariser leur situation. Surtout, le gouvernement a bien précisé que si l’entreprise était de bonne foi et qu’il n’y avait pas de volonté de frauder, aucune sanction ne serait appliquée aux employeurs.
À quoi doit donc penser un salarié qui est envoyé par son entreprise dans un autre pays pour travailler ?
Si le salarié part en expatriation, généralement il est accompagné par son entreprise qui peut le conseiller sur tous les points fiscaux. Mais le mieux, et je pense que c’est primordial, est de se tourner vers l’administration fiscale pour expliquer sa situation, anticiper et simuler si la personne sera domiciliée fiscalement ou non en France. C’est essentiel notamment pour la première année, qui est souvent une année de transition. Notamment pour les revenus annexes comme la participation ou l’intéressement qui sont versés avec un an de décalage et qui peuvent être imposés en France même si vous n’y habitez plus.
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Concernant les personnes ayant plusieurs employeurs ou contrats, comment cela va-t-il se dérouler ?
Il y a différents cas de figure : les salariés ayant plusieurs employeurs et ceux qui enchaînent les contrats, sur un mois, auprès d’une même entreprise. Cela peut être très fréquent pour les intermittents du spectacle ou bien dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration. Dans un cas comme dans l’autre, la règle veut que le prélèvement à la source doit être appliqué sur chaque fiche de paie et donc par contrat. Mais pour les salariés enchaînant les contrats auprès de la même entreprise, une question se pose : faut-il verser l’ensemble des rémunérations dues en un seul et même salaire ? Cette pratique peut avoir un impact sur les contrats courts. En effet, ces derniers bénéficient d’un abattement (50 % du Smic net imposable mensuel, dans la limite des 2 premiers mois, ndlr) qui fait que, dans la plupart des cas, la personne ne soit pas imposable. En revanche, s’il s’agit de 10 contrats payés en une seule fois à la fin du mois, le net fiscal sera plus élevé que l’abattement et donc il y aura bel et bien un prélèvement à la source d’appliqué pour le salarié, qui aura un salaire moins élevé à l’instant T. Mais il faut avoir en tête, que sur la durée, cela ne change pas grand-chose et que le salarié enchaînant les contrats courts, même s’il n’a pas de prélèvement à la source d’appliqué, peut être amené à régulariser sa situation en septembre, et donc devoir verser un impôt. Ce qui peut être embêtant quand on ne l’a pas forcément prévu…