Management

Quel leadership pour réussir sa transformation digitale ?

La question du leadership revient en force dans la stratégie des entreprises et les politiques RH. Quel type de leadership privilégier pour réussir sa transformation digitale et quelles sont les qualités les plus indispensables au leader de demain ? Par Emmanuel Stanislas, fondateur de Clémentine, cabinet de recrutement spécialiste du digital et de l’IT.

Aujourd’hui, les technologies digitales sont devenues une part essentielle du marché mondial et une dimension indissociable de la stratégie des entreprises. Elles ont accéléré comme jamais auparavant le rythme des changements dans les marchés en encourageant des modèles disruptifs qui, s’ils créent de nouveaux débouchés en menacent tout aussi rapidement d’autres.

Des leaders de l’“hyper connectivité”

Élément clef de performance dans un environnement économique complexe, la question du leadership revient en force. Qui maintenir ou placer à la tête de ses équipes dans un contexte par nature instable ? Quelles sont les qualités qui décrivent un leader connecté ? Quel type de leadership adopter pour conduire sa transformation digitale ?
Tout l’enjeu pour les entreprises est aujourd’hui de savoir anticiper les évolutions liées à l’“hyper connectivité”. En attestent les récentes évolutions : de grandes sociétés (Accor, Valeo) appellent des femmes digitales à leur board ; le géant du luxe LVMH recrute un ancien d’Apple Music en tant que Directeur numérique. Ce sont aussi des ETI qui font appel à des profils digitaux pour occuper des  fonctions d’executives, allant jusqu’à recruter à l’étranger des talents qu’ils ignorent pouvoir trouver sur place ou en interne, faute parfois de savoir identifier leurs hauts potentiels.

Manager le doute

Avant l’ère numérique, les leaders évoluaient dans un environnement pérenne ; une fois par décennie intervenait “le” grand changement : l’événement historique, l’absorption d’une compagnie par une autre, la faillite d’un concurrent, un procédé plus rentable, etc. Ces chocs pouvaient dans une certaine mesure être anticipés. Aujourd’hui, et en dépit de la quantité phénoménale de données qu’il est possible de recueillir et analyser, on ne trouvera plus une seule personne dans l’entreprise pour oser prédire avec assurance les mouvements de son secteur ou les orientations à suivre à long terme. Désormais, un leadership éclairé implique de gérer le doute et rendre constructives les incertitudes, c’est à dire : faire appel à des avis experts, s’ouvrir aussi aux points de vues extérieurs et se placer en situation d’apprentissage constant plutôt que d’expertise.

Gérer immédiateté et durée

Les capitaines d’industrie aux objectifs planifiés sur 20 ans, les plans quinquennaux et autres cycles en V ont vécu. Les entreprises sont conscientes de devoir intégrer une culture agile, apte à promouvoir et accompagner leur transformation digitale (une démarche qui n’a rien de simple, d’autant plus quand celles-ci enregistrent de bons résultats). Les bonnes pratiques peuvent très rapidement devenir obsolètes et le cycle de vie d’une stratégie gagnante tend à se raccourcir. Ce nouveau rapport au temps implique pour un leader d’investir simultanément à court et à long terme, et sans renoncer à se fixer des objectifs durables comme points de repères ; car ce sont ces mêmes objectifs, fortement associés aux valeurs de l’entreprise, qui lui permettront d’attirer et retenir les meilleurs talents.

Intégrer et retenir les talents

Aujourd’hui un leader éclairé a intégré le fait que, dans un monde toujours plus complexe et changeant, il lui est possible et indispensable de mobiliser les formidables ressources collectives de ses équipes afin d’élaborer et d’inventer des solutions aux défis rencontrés. Raison pour laquelle il lui est essentiel de réunir autour de lui les meilleurs talents, sans chercher à diriger en autocrate.
Rassembler et motiver sont les maîtres mots de la bonne conduite d’une transformation digitale. Cela suppose non seulement d’exprimer clairement ses attentes, mais aussi d’accorder autonomie, attention et reconnaissance à ses collaborateurs. Car une entreprise, quelque soient ses infrastructures et les conditions financières offertes, ne saura retenir ses meilleurs profils que si ses leaders eux-mêmes, savent reconnaître et valoriser les performances de leurs collaborateurs, et leur accorder leur confiance.

Un leadership du “lâcher prise” et des compétences douces

Il va de soi que l’on attend d’un leader qu’il possède des compétences, mais tout aussi importante est sa capacité à s’adapter à son environnement et aux innovations de l’écosystème dans lequel s’inscrit son activité. Empathie, intelligence affective, capacité à se faire des alliés, capacité d’écoute réelle (dans un monde où l’attention se fait rare) et curiosité passent désormais au premier plan, loin devant l’autorité ou la capacité à imposer son point de vue et ses directives. Ces “compétences douces” doivent aujourd’hui être identifiées par les organisations parmi leurs hauts potentiels.
Pour les chercheurs de talents, il ne s’agit plus, depuis un certain temps déjà, de traquer les profils assurés et omniscients, mais de trouver le leader qui saura mener une transformation digitale réussie. Dans ce contexte, le choix d’une activité à l’extérieur du périmètre professionnel sera lui aussi sous le prisme de l’attention des recruteurs. Les pratiques d’un candidat qui dans le passé auraient pu être perçues avec une relative indifférence (yoga, méditation, etc.) tendent aujourd’hui à refléter une plus grande attention à ses propres besoins et donc un meilleur équilibre ; chose indispensable pour le leader de la transformation digitale qui, sans être un nouveau Bouddha, aura besoin de sérénité, sur commande.
Gestion du doute, amélioration de la performance collective, conduite du changement, pouvoir de la culture de la transformation, vision évolutive, etc., le nuage de termes qui accompagnent les missions d’un leader de la transformation digitale pourrait aussi se résumer en un mot d’ordre : “lâchez prise et… interdisez-vous d’interdire”.
Dans un univers professionnel où règne un fort “jeunisme”, il est amusant de noter que l’on plonge à nouveau dans l’histoire et les références de la jeunesse des plus de 50 ans : être un leader connecté ne signifie pas être un très jeune leader.

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