Management

Risk management, ou l’art de se former à la gestion des risques et des crises

L’anticipation des risques et la gestion de crises émergent comme des compétences incontournables pour naviguer dans la complexité du monde professionnel. Entre l'évolution erratique des marchés, les crises en tout genre et les défis socio-économiques, les organisations ont tout intérêt à investir dans ces expertises pour muscler leur résilience.

Si le management des risques et des crises ont longtemps été considérées comme des fonctions « sous-marin », la période Covid a révélé leur rôle vital pour assurer la pérennité des organisations. Mais de quoi s’agit-il ? Le management des risques vise à identifier, analyser, évaluer, synthétiser et hiérarchiser l’ensemble des risques potentiels tels que l’explosion d’une usine, la corruption ou encore une catastrophe naturelle. En fonction des priorités, son rôle est d’établir un plan de gestion de crise et de le suivre afin de s’assurer que l’activité se poursuit (plan de continuité). Quelles compétences met-on derrière la gestion des risques et comment s’en doter ? Faut-il former les managers et/ou sensibiliser les collaborateurs à ces « réflexes » pour créer une organisation plus résiliente ? Comment les risk managers anticipent-ils les crises potentielles ? Est-ce un don ou existe-t-il une méthode ?

Appréhender les crises : un équilibre entre hard skills et soft skills  

« Les organisations se fondent généralement sur des tendances émises par les grands cabinets en stratégie. Or, ces enquêtes proviennent des anticipations des plus grands CEO internationaux qui se réfèrent eux-mêmes aux événements passés pour imaginer l’avenir. C’est donc assez réducteur », souligne Raphaël de Vittoris, risk manager au sein de Symbio, ancien crisis manager chez Michelin et auteur de l’ouvrage à paraître « Déjouer les risques » (Éditions Dunod). L’un des outils largement utilisés pour appréhender les risques est la « matrice de Farmer ». Cette « matrice de probabilité » vise à évaluer la gravité d’un risque par rapport à sa fréquence afin d’en sortir une probabilité. « En un schéma, cet outil permet de prioriser les risques, puis de communiquer efficacement auprès d’un COMEX. Mais on passe à côté des Cygnes Noirs dont parle Nassim Taleb : ces événements hautement improbables avec des impacts colossaux. » Dans la complexité actuelle, l’enjeu, selon Raphaël de Vittoris, « n’est pas tant de savoir lister les crises potentielles mais de comprendre comment elles s’enchaînent ». Pour cela, la méthodologie est indispensable mais lacunaire : « Les organisations ont besoin de personnes créatives capables de connecter rapidement des concepts de nature différente et de les articuler. » L’imagination est donc la soft skill en tête de liste pour penser de manière systémique les risques en série. 

Risk management : le pari d’une entreprise plus résiliente

Tout au long de l’évolution d’une entreprise ou d’un projet, la diversité des risques est telle que les managers ont besoin d’un accès optimal à des informations fiables et claires sur les facteurs de risque. « La survenue de la crise va révéler l’état de préparation de l’entreprise», explique Benoît Vraie, risk manager sur le terrain et enseignant sur le sujet chercheur (Paris 1). Afin de mettre en place une gouvernance en adéquation avec les enjeux de l’organisation, l’expert défend une approche modulaire de la gestion de crise incluant les dimensions psychologique et comportementale. Le but ? Éviter les comportements atypiques ou pathogènes des membres de la cellule de crise sous stress. « Nous mettons en place des stratégies de cadence de prise de décisions et dédions une fonction spécifique pour cela : le coordinateur de crise. Ce dernier ne prend pas part au contenu de la décision mais en assure le rythme, tel un métronome. » Un autre point essentiel est le positionnement du risk manager dans l’organisation : « Il faut qu’il ou elle ait accès au COMEX. Lors de la crise COVID, au sein de Michelin, j’étais en communication quotidienne avec l’équipe dirigeante. Sans cela, il aurait été difficile d’assurer la pérennité du groupe », souligne Raphaël de Vittoris. 

Former ses équipes à la gestion des risques : mode d’emploi 

Former ses équipes à des potentialités reste un défi au sein des organisations. C’est pourquoi, Raphaël de Vittoris propose plutôt l’activation de réflexes : « Il s’agit de créer une sorte de “frayage”, à savoir le fait de susciter une excitation neuronale, qui permet d’entraîner les managers à réagir plus rapidement (et sereinement) face à un danger. Pour créer ces simulations, les serious games sont une modalité intéressante. » En complément, Benoît Vraie a lancé des sessions de coaching auprès de certaines cellules de crises et de coordinateurs pour travailler leur résilience. Concernant la cible salariés, Raphaël de Vittoris a mis en place au sein de Symbio – et auparavant Michelin – de la sensibilisation régulière via des newsletters ou des vidéos diffusées sur écrans dans les espaces collectifs. Des formations continues existent également à destination des managers ou des collaborateurs : « Dans le cadre de l’Association des risk managers français, il existe des formations courtes. D’autres sont même qualifiantes (CEFAR) ou diplômantes au sein d’un parcours pédagogique à Paris 1 en partenariat avec le RAID », conclut Benoît Vraie. 

Ajouter un commentaire

Votre adresse IP ne sera pas collectée Vous pouvez renseigner votre prénom ou votre pseudo si vous êtes un humain. (Votre commentaire sera soumis à une modération)