Qu’est-ce qu’un cadre ? Alors que le Medef propose de renvoyer aux branches professionnelles le soin de définir ce qu’est un personnel d’encadrement dans le “contexte sectoriel qui est le sien”, les syndicats Ugict-CGT et CFE-CGC réclament une définition “utilisable au niveau national” pour éviter les dérives.
Vendredi 17 janvier 2020, deux ans après la première réunion de négociation sur l’encadrement, les partenaires sociaux ont échangé autour d’un texte patronal, qui vise à définir le statut des cadres, voué à disparaître avec la fusion des caisses Agirc et Arrco, intervenue en 2019.
Lors de la séance de négociations, le Medef a ainsi proposé un “texte de synthèse”, baptisé “Les enjeux pour les collaborateurs exerçant des responsabilités”, dans lequel il décline 17 “orientations”, et insiste sur l’évolution de l’environnement de travail du cadre et sur ses relations avec l’employeur.
L’absence d’une “définition interprofessionnelle” de l’encadrement
Le patronat définit les cadres comme des “salariés occupant un poste de travail présentant un degré d’exigence supérieur au regard des caractéristiques suivantes : niveau de compétences, marge d’autonomie et niveau de responsabilité”. Selon lui, “le cadre se distingue par la position très particulière qu’il occupe dans l’entreprise, et peut participer notamment à la déclinaison des enjeux importants voire stratégiques de l’entreprise.”
“A l’intérieur même de l’entreprise, le cadre, qu’il exerce des fonctions d’expertise et/ou de management, évolue dans un univers profondément transformé : agilité et adaptabilité caractérisent sa fonction dans l’entreprise, dans un environnement où l’information doit circuler très vite, et où la prise de décision est de plus en plus rapide”, ajoute le Medef.
Ce projet “d’orientations en faveur des cadres” est toutefois loin de satisfaire les organisations syndicales. Marie-José Kotlicki, secrétaire générale de l’Ugict-CGT, décrit ainsi le texte proposé par le patronat comme “déséquilibré, principalement parce qu’il y manque une définition interprofessionnelle de l’encadrement”. Le texte stipule en effet qu’il “n’y a pas de définition univoque du cadre”, et renvoie “à chaque branche” le soin de “définir ce qu’est un cadre dans le contexte sectoriel qui est le sien”.
Selon les syndicats (CFE-CGC ET Ugict), la négociation, qui se poursuivra les 5 et 28 février prochain, devra impérativement “sécuriser le périmètre” de l’encadrement, avec une définition “utilisable au niveau national”, dans le cadre d’un accord national interprofessionnel (ANI), sans quoi cela reviendrait à “laisser les branches professionnelles et chaque employeur définir arbitrairement qui est cadre et qui ne l’est pas en fonction du poste occupé”.
“Prêtes à en rajouter au cadre bashing ambiant, les entreprises se défaussent en outre de toutes leurs responsabilités, environnementales, sociales, économiques, pénales et civiles sur les personnels d’encadrement, qu’ils exercent ou pas des fonctions de management. Pire, les cadres devraient renoncer à leurs propres droits : par exemple, puiser dans leur compte personnel de formation et inviter leurs équipes à en faire autant pour mieux exonérer les entreprises de leurs propres obligations en matière de formation”, note l’Ugict-CGT dans un communiqué.
La prévoyance absente du texte
Autre critique des syndicats : le fait que dans son document, le Medef n’aborde pas du tout le sujet de la prévoyance obligatoire des cadres ; alors même que l’objet des négociations est d’aboutir à une définition commune, notamment pour déterminer les bénéficiaires du dispositif de prévoyance. “Il faut absolument conclure rapidement un accord national interprofessionnel (ANI) définissant, valorisant et motivant les salariés de l’encadrement dans l’intérêt des entreprises et de tous les salariés”, indique Gérard Mardiné, secrétaire national de la CFE-CGC, dans un autre communiqué.
De son côté, Marie-José Kotlicki dénonce “des accords illégaux en entreprise pour abaisser la prévoyance des cadres et leur demander de cotiser eux-mêmes”, et ajoute que “s’il n’y a pas de définition nationale interprofessionnelle, nous demanderons des contrôles dans les organisations”.
Finalement, les syndicats proposent la définition de l’encadrement suivante : “est cadre celui qui a une aptitude à des fonctions à caractère intellectuel prédominant (…), auquel il est confié des fonctions qui conditionnent ou induisent la réflexion et/ou l’action d’autres salariés et, par la même, influe significativement dans les domaines économiques, sociaux, sociétaux et/ou environnementaux (…), qui a une marge suffisante d’initiative et/ou d’autonomie dont l’amplitude dépend des responsabilités et/ou de la délégation de pouvoir qui lui sont confiées (…), et qui a une responsabilité effective contribuant à la marche et au développement de l’entreprise”.