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Valérie Trierweiler : “On m’a reproché de vouloir tout avoir”

Trois ans après le succès de son livre autobiographique Merci pour ce moment, Valérie Trierweiler a publié au printemps dernier Le secret d’Adèle. L’occasion de revenir avec elle sur ses méthodes de travail mais aussi sur le rôle de Première dame qu’elle a occupé pendant près de deux ans. Rencontre.

 

Arrivée à l’Élysée aux côtés de François Hollande en 2012, Valérie Trierweiler a souvent fait face aux critiques, qu’elles soient politiques ou médiatiques. Avec son livre autobiographique, Merci pour ce moment, dans lequel elle revient sur sa relation avec l’ancien président de la République, elle a suscité autant la polémique que la passion. Écoulé à 800 000 exemplaires, l’ouvrage a permis à la journaliste de Paris Match de se faire davantage connaître du grand public. À l’occasion de la publication de son premier roman, Le secret d’Adèle, nous avons rencontré celle qui fut la Première dame des Français pendant presque deux ans. Un entretien durant lequel Valérie Trierweiler est revenue sur cette fonction si particulière, à l’heure où Emmanuel Macron a rendu publique la “charte de transparence” clarifiant le rôle de son épouse.

 

Vous venez de publier votre deuxième ouvrage, un roman basé sur les personnages historiques que sont Gustav Klimt et son modèle Adèle Bloch-Bauer. Comment l’idée vous est-elle venue ?

Ce roman est le prolongement même de mon métier. En fait, il y a un an, Paris Match avait lancé une série d’été sur l’histoire de plusieurs œuvres. On m’a demandé d’écrire le papier sur La Dame en Or de Gustav Klimt, tableau pour lequel Adèle Bloch-Bauer était son modèle. La rédaction voulait vraiment s’axer sur l’histoire et non sur l’affaire juridique pour lequel l’œuvre est connue, suite à la spoliation par les nazis. Je n’y connaissais rien, je me suis énormément documentée et j’ai rendu mon article. Depuis, le personnage ne m’a plus quittée. J’ai beaucoup hésité entre écrire une biographie et un roman. Quand j’ai vu que j’étais habitée par le personnage et que l’imagination venait, je me suis lancée.

 

Depuis sa publication, en mai dernier, les médias et critiques mettent en avant les parallèles entre la vie de votre héroïne et votre propre histoire. Estimez-vous, en tant qu’écrivain, qu’il est nécessaire de distiller, même de manière involontaire, des éléments autobiographiques ?

Effectivement, je pense que dès que l’on se lance dans l’écriture, il y a toujours un moment où l’on injecte des éléments autobiographiques. J’ai effectué beaucoup d’interviews d’écrivains dans le cadre de mon métier et nombreux sont ceux à m’avoir dit qu’il arrive toujours une phase où le personnage vous échappe. De mon côté, je pense que c’est plutôt l’inconscient qui prend le dessus, ce qui bouleverse ce que vous aviez prévu au départ. C’est ce que j’ai vécu avec Adèle Bloch-Bauer et j’ai trouvé cela extraordinaire et magique. Même si on ne se rend pas forcément compte tout de suite de ce qu’il se passe.

Avec le recul, je réalise que parfois, c’est peut-être mon inconscient qui a parlé. Mais attention, sa vie n’est pas la mienne. La différence fondamentale réside notamment dans le fait que son drame vient du fait qu’elle n’a jamais eu d’enfant, tandis que j’ai la chance d’avoir trois garçons.

 

Dans ce premier roman, vous dessinez le portrait d’une féministe, qui a des convictions et qui se bat pour les garder. Diriez-vous que cela vous ressemble ?

Oui mais ce qui m’aurait intéressé, c’est de savoir quelle femme j’aurais été à cette époque là. Nous connaissons très peu de chose sur Adèle Bloch-Bauer mais on sait qu’elle était en avance sur son temps, qu’elle défendait des idées assez libérales concernant la cause des femmes. Elle vient d’un milieu différent du mien, donc je ne dirais pas que l’on se ressemble, mais nous nous sommes rencontrées.

 

 

Valérie Trierweiler
Photo : Arnaud Meyer

 

Vous êtes une femme investie dans plusieurs associations (Secours Populaire, France Libertés, Action contre la faim). On peut dire de vous que vous êtes une femme engagée. Mais d’après-vous, peut-on être efficace sur tous les fronts ou faut-il savoir choisir ses combats ?

Aujourd’hui je suis seulement engagée auprès du Secours populaire. Occasionnellement je continue de donner des coups de main à d’autres associations. Mais j’ai préféré me focaliser sur une seule. D’abord car je trouve que le Secours populaire à un spectre d’actions extrêmement large : il s’occupe des enfants, des familles, des jeunes et des femmes. Parfois, bien sûr, j’aimerais défendre un peu plus certaines causes, comme celle des femmes. Mais je ne peux pas me disperser trop, car cela prend du temps. Et si l’on veut être efficace pour l’association pour laquelle on s’engage, il ne faut pas qu’elle se demande si l’on est disponible ou non. Il faut que ce soit clair pour tout le monde.

 

Vous dites que vous aimeriez vous investir davantage pour la cause des femmes. Que souhaiteriez-vous faire ? Quel regard portez-vous de la place des femmes dans les entreprises ?

Quand je vois la situation de certaines femmes seules avec des enfants à charge, qui se lèvent à l’aube pour travailler et se retrouvent avec un salaire faible, j’aimerais pouvoir faire plus. De manière générale, sur la cause des femmes, je trouve que l’on régresse sur bien des points. Il y a encore beaucoup de chemin à faire notamment en entreprise en matière de salaires. Dans mon métier de journaliste, la place a été faite aux femmes mais parallèlement on dit que la profession se paupérise.

 

Cela signifie que quand les femmes investissent un domaine on considère que le métier ne vaut plus rien. Cette association est vraiment terrible et rétrograde. Il faut donc essayer de lutter le plus possible contre ces perceptions.

 

Vous avez occupé le rôle de Première dame pendant quasiment deux ans. Durant cette période, vos faits et gestes ont été scrutés, analysés et souvent critiqués. On peut notamment penser au tweet de soutien à Olivier Falorni, opposant dissident à Ségolène Royal lors des législatives, qui a fait polémique. Alors que les médias et les politiques avaient des attentes précises vis-à-vis de vous et de votre rôle, comment avez-vous réussi à faire accepter votre pensée ?

Ce qui a été difficile, finalement, c’est de découvrir que l’on avait reculé.

Car à une époque antérieure à la nôtre, Danielle Mitterrand, en tant que Première dame, avait fait des choix qui étaient parfois à l’opposé de son mari. Elle les assumait, les portait et les clamait. Attention, je ne me compare pas à elle, loin de là.

Mais j’estime que j’ai un caractère propre et que je peux penser différemment de la personne avec laquelle je vis, président ou non. Je pensais donc qu’on pouvait encore m’accorder cette liberté. Mais ce ne fut pas le cas et c’est cela qui fut le plus difficile.

 

Vous avez toujours revendiqué votre liberté de ton ainsi que votre volonté de conserver votre emploi de journaliste en parallèle de votre rôle de Première dame. Était-ce pour vous une façon de casser les codes ?

Pas du tout. Avant tout, et cela personne ne veut l’entendre, je souhaitais continuer à travailler parce qu’à l’époque, j’avais encore trois enfants à ma charge financière. Je les assumais seule depuis plus de dix ans, donc il était nécessaire que je continue à travailler. On ne l’a pas compris mais on me reprochait de vouloir tout avoir. Mais comment pouvait-on me reprocher, en même temps, de vivre aux crochets de l’Élysée et de vouloir continuer à travailler ?

 

Pourquoi le fait de conserver votre emploi a fait autant polémique ?

Tout simplement parce que c’était nouveau. Quand on est Première dame, on fait du bénévolat. Mais est-ce que c’est interdit d’avoir un emploi en faisant du bénévolat ? Pas du tout. Je crois tout simplement qu’il y a une vision rétrograde du rôle de Première dame : on s’attend à ce qu’elle soit bien habillée, qu’elle sourit et qu’elle s’occupe de ses enfants. Si je n’avais pas continué à travailler, imaginez ce qu’il se serait passé après ma rupture avec François Hollande. Je n’aurais peut-être pas retrouvé du travail comme journaliste, sans doute j’aurais été exclue de ce milieu. Je n’ai donc aucun regret, bien au contraire. Le bon choix fut de m’accrocher à mon job.

 

Et si j’ai un conseil à donner aux femmes : ne soyez jamais dépendantes !

 

En 2014, quelques mois après votre rupture avec François Hollande, vous avez publié votre autobiographie Merci pour ce moment dans lequel vous revenez sur votre relation avec l’ancien président. Vos propos ont fait beaucoup réagir. Si vous avez connu le succès auprès du public vous avez été vivement critiquée par la presse et la sphère politique. Aujourd’hui, quel regard portez-vous sur ce qui a pu vous être reproché ?

Ne pas tenir compte des critiques, cela n’existe pas. Donc forcément il y en a certaines qui m’ont blessée. Mais ce dont je suis à peu près sûre aujourd’hui, c’est que les propos les plus virulents venaient de personnes qui n’avaient pas encore lu le livre. Donc, de fait, j’y porte moins attention. Mais certains journalistes m’ont appelée plus tard et ce sont excusés. Quant aux critiques venant des politiques, je n’en tiens pas compte. Car ce sont des gens qui sont dans les mêmes milieux et qui se soutiennent, donc il y a une certaine solidarité de classe. J’ai toujours été consciente d’une chose c’est que je n’avais pas d’amis dans ce milieu là.

 

Vous attendiez-vous à autant de répercussions ? Avec le recul, est-ce qu’il y a des choses que vous auriez fait différemment ?

Je ne m’attendais pas à ce que cela fasse autant de bruit. Mais peut être que mon tort fut de ne pas avoir assez pris la parole sur ce livre. J’y raconte aussi tout ce que j’ai fait lorsque j’étais Première dame, mais cela peu de gens en avait conscience. À l’époque, je n’ai fait aucune promotion, donc sûrement que je n’ai pas assez montré qui j’étais, que je n’ai pas expliqué ce que j’avais fait. Il était légitime que les gens se demandent ce que j’avais fait quand j’étais à l’Élysée.

Mais il faut se souvenir qu’après le communiqué officiel concernant notre rupture, le jour même on faisait disparaître du site Internet de l’Élysée tout ce que j’avais fait. Cela a été très violent.

 

Vous diriez que les Français n’ont pas assez entendu parler de votre action quand vous étiez Première dame ?

C’est plutôt moi qui ne voulais pas. Je ne cherchais pas à communiquer autour de mes actions car je souhaitais rester le plus naturelle possible avec mes interlocuteurs. La médiatisation, je trouve, a un côté vendeur. Je n’avais rien à vendre et mon image de Première dame, je ne l’ai pas travaillée, cela ne m’intéressait pas. Et c’est peut-être ça mon erreur. Mais ce que je voulais c’était avancer concrètement dans des actions avant de les médiatiser. Première dame, c’est un rôle unique mais pas évident à endosser.

 

Valérie Trierweiler en quelques dates

1965
Naissance à Angers.

1989
Arrivée à Paris Match.

2005
Début de sa relation avec François Hollande.

2012
Elle devient la Première dame des Français après l’élection de François Hollande.

2014
Après sa rupture avec l’ancien président, elle publie Merci pour ce moment (ed. Les Arènes).

2017
Elle publie son premier roman, Le secret d’Adèle (ed. Les Arènes).

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