Ce n\u2019est pas exactement un doublement, puisque jusqu\u2019ici, nous \u00e9tions \u00e0 3 jours d\u2019accueil de l\u2019enfant, plus 11 jours de cong\u00e9 paternit\u00e9. Un cong\u00e9 qui n\u2019\u00e9tait pas pris par 33 % des salari\u00e9s hommes. Le passage \u00e0 28 jours est une bonne chose, mais c\u2019est encore insuffisant. D\u2019autant que, toutes proportions gard\u00e9es, cette mesure ne co\u00fbtera pas si cher que cela (autour de 500 millions d\u2019euros), et que des sommes bien plus importantes ont \u00e9t\u00e9 d\u00e9pens\u00e9es ces derniers mois par l\u2019\u00c9tat dans le contexte de la crise du Covid-19.<\/p>
Cela reste int\u00e9ressant, car nous revenons de tr\u00e8s loin. Avec des r\u00e9sistances de toutes parts : chez les employeurs, comme chez les salari\u00e9s eux-m\u00eames. Tout le monde semble avoir envie d\u2019un meilleur \u00e9quilibre vie professionnelle \u2013 vie personnelle. Tout le monde est pour un cong\u00e9 rallong\u00e9, mais peu de personnes ont envie qu\u2019il devienne obligatoire et\/ou coercitif. (1)<\/strong> En effet, certains n\u2019ont pas forc\u00e9ment envie de l\u2019utiliser, au moment o\u00f9 ils sont en pleine ascension de carri\u00e8re, et o\u00f9, culture pr\u00e9sent\u00e9iste \u00e0 la fran\u00e7aise oblige, ils pensent que c\u2019est parce qu\u2019ils vont se montrer qu\u2019ils r\u00e9ussiront \u00e0 obtenir quelque chose.<\/p> Une telle mesure<\/a>\u00a0a l\u2019avantage de remettre les questions de parentalit\u00e9 et de paternit\u00e9 \u00e0 l\u2019agenda. De nombreuses \u00e9tudes en font l\u2019une des conditions pour am\u00e9liorer le bien-\u00eatre des enfants, la sant\u00e9 des m\u00e8res, l\u2019\u00e9quilibre entre les temps de vie, l\u2019\u00e9galit\u00e9 professionnelle entre hommes et femmes<\/a>, et l\u2019\u00e9volution des mentalit\u00e9s dans les entreprises.<\/p> L\u2019on peut esp\u00e9rer que dans 5 ans, celui qui n\u2019aura pas recours \u00e0 son cong\u00e9 paternit\u00e9 sera autant montr\u00e9 du doigt que la femme qui aura renonc\u00e9 \u00e0 la majorit\u00e9 de son cong\u00e9 maternit\u00e9<\/a>. Il s\u2019agirait d\u2019un changement radical d\u2019\u00e9tat d\u2019esprit, qui changerait aussi les fa\u00e7ons de travailler, de s\u2019organiser au travail. Il est saisissant de voir le retard que prennent les hommes pour annoncer leur paternit\u00e9 \u00e0 leur employeur : alors que les femmes informent leur entreprise au bout de 12 semaines ; ils attendent en moyenne 7 mois pour le faire. Ce qui signifie qu\u2019ils s\u2019auto-censurent.<\/p> \u00a0<\/p> \u00a0<\/p> Le probl\u00e8me, avec les 7 jours obligatoires pour les p\u00e8res, c\u2019est le risque d\u2019instaurer un cong\u00e9 \u00e0 deux vitesses. Celui qui sera en CDD, pr\u00e9caire, en mauvais termes avec son manager, se limitera probablement aux 7 jours ; tandis que le cadre pour qui tout va bien et qui sera en position de force n\u2019h\u00e9sitera pas \u00e0 prendre 28 jours complets. L\u2019erreur, ce serait d\u2019instaurer une obligation faite \u00e0 l\u2019individu, l\u00e0 o\u00f9 il serait int\u00e9ressant de travailler sur ce que les employeurs pourraient mettre en \u0153uvre. Des mesures ne passant pas que par des obligations l\u00e9gales, mais aussi par un dialogue social de qualit\u00e9, autour de la paternit\u00e9.<\/p> Plut\u00f4t que d\u2019instaurer 7 jours obligatoires d\u2019une fa\u00e7on arbitraire, il serait pr\u00e9f\u00e9rable de faire de ce cong\u00e9 une nouvelle normalit\u00e9. Par exemple, en faisant en sorte que les papas n\u2019ayant pas pris leur cong\u00e9 renoncent \u00e0 un certain nombre de droits dans leur entreprise ; notamment \u00e0 une \u201cprime \u00e0 l\u2019absent\u00e9isme\u201d<\/em>, qui remplacerait la primes au pr\u00e9sent\u00e9isme.<\/p> Les entreprises doivent jouer le jeu : de la m\u00eame fa\u00e7on qu\u2019il leur est interdit de faire travailler une femme dans les 2 semaines pr\u00e9c\u00e9dant l\u2019accouchement et les 6 semaines qui suivent, les employeurs devraient int\u00e9grer de fa\u00e7on banale le principe de l\u2019absence du jeune p\u00e8re dans les semaines qui suivent la naissance d\u2019un enfant.<\/p> Attendons de voir le contenu du d\u00e9cret qui instaurera cette mesure, mais pour l\u2019heure, je n\u2019ai rien vu de pr\u00e9vu pour que les employeurs accompagnent r\u00e9ellement la paternit\u00e9 des jeunes p\u00e8res, avant et apr\u00e8s la naissance. Par exemple, comme pour les femmes, ils devraient \u00eatre forc\u00e9s d\u2019organiser des entretiens pr\u00e9alables au d\u00e9part en cong\u00e9 paternit\u00e9 des hommes, durant lesquels ces derniers pourraient exprimer leurs besoins et leurs questionnements. De plus en plus, les salari\u00e9s p\u00e8res partagent la charge mentale de leurs compagnes, et ont peur d\u2019\u00eatre per\u00e7us comme d\u00e9sengag\u00e9s par leur entourage professionnel, par exemple s\u2019ils partent relativement t\u00f4t pour r\u00e9cup\u00e9rer leur enfant \u00e0 l\u2019\u00e9cole. Les dirigeants doivent entendre que la conciliation des temps de vie est autant l\u2019affaire des femmes que des hommes.<\/p> \u00a0<\/p> \u00a0<\/p> La posture manag\u00e9riale est fondamentale. Un texte comme celui-ci doit imp\u00e9rativement entra\u00eener une transformation des postures, sans quoi il ne servira pas \u00e0 grand chose et risquera d\u2019instaurer dans la pratique un cong\u00e9 \u00e0 deux vitesses. Les entreprises devront donc se saisir de cette mesure pour en faire un levier d\u2019innovation manag\u00e9riale et de transformation des comportements, des habitudes et des normes dans la vie au travail.<\/p> Cela n\u00e9cessiterait notamment une formation des managers \u00e0 de nouvelles postures \u00e0 adopter face \u00e0 la question de la conciliation des temps de vie. Ils doivent apprendre \u00e0 organiser le travail et \u00e0 manager leurs \u00e9quipes de fa\u00e7on \u00e0 ne plus \u00eatre dans le \u201ccommand and control\u201d<\/em>, \u00e0 donner davantage d\u2019autonomie aux collaborateurs, et \u00e0 rendre les horaires de travail plus flexibles<\/a>.<\/p> \u00a0<\/p> \u00a0<\/p>LIRE AUSSI<\/strong> : \u00c9galit\u00e9 femmes-hommes : Ces entreprises qui allongent d\u00e9j\u00e0 le cong\u00e9 paternit\u00e9<\/a><\/h5>
Que devrait-on faire pour r\u00e9ellement inciter les salari\u00e9s \u00e0 avoir recours \u00e0 leur cong\u00e9 paternit\u00e9 ?<\/h3>
LIRE AUSSI<\/strong> : Confinement : \u201dApr\u00e8s la crise, la parentalit\u00e9 en entreprise y gagnera certainement\u201d<\/a><\/h5>
Tout est en fait une question d\u2019attitude de la part de l\u2019employeur\u2026<\/h3>
LIRE AUSSI<\/strong> : \u00c9galit\u00e9 femmes-hommes au travail : \u00ab l\u2019empowerment est la cl\u00e9 \u00bb<\/a><\/h5>